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dimanche 18 novembre 2018

Chronique de Serres et d’ailleurs IV (10)


Auditrices et auditeurs qui m’écoutez, bonjour. L’Union Européenne est en émoi depuis le référendum sur la sortie de l’union qui a eu lieu dans le Royaume-Uni. En effet, le mot Brexit est entré dans le langage commun des média français et autres, il faut bien reconnaître qu’il leur en faut peu pour se goberger de néologismes, surtout si ces derniers sont d’origine ou de consonance étrangère. En résumé, si le Royaume-Uni reste uni, l’Union Européenne tend plutôt à la désunion et au détricotage. Il faut tout autant reconnaître que cette union ressemble bien à une sorte de manteau d’arlequin, un paletot en patchwork dont on ne sait comment enfiler les manches, aux poches trouées et au col qui gratte.
Les britanniques ont été intègres dans leur démarche, on leur a proposé un référendum, ils ont fait un choix et leur gouvernement travaille à respecter ce choix. Ce n’est pas en France qu’on verrait cela car on nous a donné du Lisbonne simplifié comme amère potion pour nous guérir du vote majoritaire contre le traité constitutionnel. Il faut dire que, comme outre-manche, les minoritaires des référendums se sont mobilisés pour en demander un autre de telle sorte qu’à force de voter et revoter les électeurs arrivent enfin à bien voter, c’est-à-dire à voter conformément à la bienpensance bourgeoise libérale, qu’elle soit de gauche ou de droite. Les bourgeois bienpensants n’aiment la démocratie que lorsqu’elle est à leurs bottes. Faut pas exagérer tout de même, tout le monde a le droit de voter mais pas n’importe quoi !
Et, à ce propos, les journaux français se font l’écho des doléances des ressortissants britanniques dans notre pays. D’aucuns parmi ces derniers avaient pris l’habitude de se la couler douce chez nous, jouissant d’une livre sterling favorable et d’un statut hybride d’expatriés – des expats comme ils disent, mot plus noble que migrants ou immigrés – et d’un seul coup le fog leur tombe sur la tête, à eux qui n’ont pas su ce que c’était de solliciter une carte de séjour tous les six mois, au bon vouloir de la préfecture de leur lieu de résidence. Mais gageons qu’ils trouveront encore le moyen de demander la nationalité française tout en gardant la britannique. Butter and money of the butter, en quelque sorte le beurre et l’argent du beurre.
Il faut bien constater que les britanniques interviewés par les journaux sont tous des gens bien installés et que ne sont pas consultés les requins outremanchistes qui écument notre région en faisant du black principalement chez leurs compatriotes les plus fortunés. Le gouvernement de Sa Gracieuse Majesté a aussi dépêché dans nos régions une sorte d’ambassadeur itinérant qui, de réunion en réunion, vient mettre du baume sur les cœurs ulcérés et les portefeuilles meurtris de ces sujets à la dérive et nos journaux en font leurs choux gras, compatissants envers ces exilés, modernes robinsons.
Pour leur montrer toute mon empathie, je citerai un florilège de leur William national, et pour commencer deux phrases du roi Lear : « Le malheur du temps est que les fous guident les aveugles. » et  « Souvent par une plénitude de mauvaise conduite nous accusons de nos désastres le soleil, la lune et les étoiles, comme si nous étions infâmes par nécessité, imbéciles par une impérieuse volonté du ciel. »  Puis Macbeth : « La vie n'est qu'une ombre qui passe, un pauvre acteur qui s'agite et parade une heure, sur la scène, puis on ne l'entend plus. C'est un récit plein de bruit, de fureur, qu'un idiot raconte et qui n'a pas de sens. »


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