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dimanche 13 janvier 2019

Chronique de Serres et d’ailleurs IV (18)


Auditrices et auditeurs qui m’écoutez, bonjour. Je vais une nouvelle fois vous parler d’un roman régional dont l’action se situe dans les landes de Gironde et du côté de Gujan. Ce roman s’intitule « Les saisons du pardon 1914-1923» L’auteure s’appelle Corinne Nadaux. J’avais eu l’honneur de la rencontrer en mars 2016 à un salon du livre à Libourne.
Ce titre est merveilleux car les personnages de ce roman vivent vraiment au rythme des saisons, que ce soient les saisons du travail de la pinède et du ramassage de la résine, les saisons de la guerre ou les saisons de l’amour et de la gestation. Et, au bout de tant de saisons, le pardon viendra lentement au gré de la cicatrisation des blessures des conflits. Car chacun d’entre eux devra apprendre le pardon, au travers de tant de mensonges, de trahisons et de souffrances.
L’auteure nous mène d’abord dans les pinèdes, chez les résiniers où Berthomieu Fabres, sylviculteur, est maître d’un domaine, un pinhadar de la montagne testerine où se récolte, de février à octobre, l’ « or blanc » des majestueux pins de la plaine sablonneuse. La guerre arrive et Berthomieu, comme tant d’autres, est envoyé sur le front où les saisons sont de feu et d’acier, de sang et de larmes, de peur et de mort. De son côté, sa fille Joséphine  tombe amoureuse de Paul, un soldat en permission, au cours d’un bal à la fin duquel elle lui donne son corps et son cœur. Mais il faudra bien des saisons avant qu’il retrouve son souvenir alors qu’elle, de son côté, ne l’oubliera pas. Comment l’oublier d’ailleurs puisqu’elle porte un enfant qui fera autant sa joie que son indignité. Car la mère de Joséphine, pour la punir et pour l’éloigner, l’envoie travailler chez une blanchisseuse du canal des landes, près de Gujan. Si elle l’y envoie, c’est pour qu’elle y reste et y disparaisse avec cet enfant de la honte. La jeune bourgeoise Joséphine apprendra durement le métier de blanchisseuse pour vivre et pour nourrir son enfant. Mais, sous la férule aimable de Blanche, elle trouvera dans son travail et dans la compagnie des autres blanchisseuses le courage de continuer à vivre et surtout d’espérer.
Car les saisons se succèdent, les années passent, et après les orages de la guerre les hommes et les femmes ont changé. La peur, les souffrances et la mort sont passées si près que rien n’est plus comme avant et que tout peut, autrement, redevenir. Les saisons du pardon pourront amener leurs fleurs d’automne, il n’y aura plus d’hiver pour les cœurs.
Ce récit est parsemé çà et là de savoureuses expressions gasconnes – telle « peligoustraye » par exemple, ce qu’elle traduit par « coureur de jupon » – et aussi de termes de métier dont l’auteure nous livre généralement la traduction au fil des pages. Je cite par exemple page 9 : « Ces pauvres gens travaillaient dur : Du haut de leur pitey, le hapchot entre les mains, ils piquaient de février à octobre l’arbre d’or. De chaque entaille ou care s’écoulait la résine appelée or blanc. Les femmes s’occupaient de l’amasse. Il s’agissait pour elles de vider les pots pleins de résine dans un grand seau, l’escouarte. La dernière étape de cette longue campagne, consistait dans le barrasquage : la résine durcie autour de la care, nommée le barras, était raclée puis recueillie dans une grande toile, pour être mélangée à la résine molle. » On retrouve à travers ces mots l’âme du terroir et la réalité des travaux agricoles dans ce jargon si concret.
Ce livre a été publié en auto édition avec le soutien de A4PM. Pour tout contact, je vous donne l’adresse mail : a4pm.asso@gmail.com. J’ai essayé, sans succès, de contacter l’auteure. Peut-être réussirez-vous mieux que moi. Bonne année 2019.

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