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jeudi 23 mai 2019

Appelez-moi Fortunio (15)


Entretemps, le gérant d’immeubles avait appelé Albert pour un travail urgent, à savoir débarrasser toute une petite maison de la cave au grenier. La propriétaire des lieux était décédée un mois plus tôt et ses héritiers, deux lointains neveux, souhaitaient faire vider les lieux avant de vendre. Albert était allé se rendre compte sur place du travail à réaliser. La propriétaire était décédée brutalement et la maison était restée dans l’état où elle l’avait laissée. Mais, mis à part quelques légumes avariés dans le frigo - qui fonctionnait toujours – l’ensemble était assez net. Il prit les premières mesures utiles, arrêter l’eau chaude sanitaire et vider congélateur et frigo. La maison, pour petite qu’elle soit, était meublée correctement et le premier réflexe d’Albert fut de passer un coup de téléphone à René Cinsault pour lui demander si, suite à sa séparation, il n’avait pas besoin de mobiliers ou autres ustensiles.
-          Mon cher Albert, s’exclama René, tu es l’homme qui tombe à pic ! Imagine : je m’étais mis en ménage avec une charmante jeune femme qui venait, elle aussi, de se séparer de son compagnon. J’étais déjà moelleusement installé dans ses meubles lorsque sans crier gare, le compagnon en question fait un comeback et voilà-t-il pas que ma nouvelle me propose de prendre la porte, avec mon peu d’armes et bagages. Et me voilà maintenant à la rue. Enfin, pas tout à fait mais presque. J’ai trouvé une maison à louer pour un petit prix mais ma bientôt ex-épouse a gardé tout le mobilier et la batterie de cuisine. J’attendais un miracle et il arrive ! Loué soit le seigneur et son bras droit, Albert le magnifique ! Alors, je loue un camion et je viens quand ? Bien sûr je récupèrerai ce que tu me donneras mais je te filerai un coup de main pour le nettoyage complet. Alors, dis-moi quand ?
-          Mais, mon cher René, dans les meilleurs délais aussi vite qu’il vous sera possible car il m’est instamment demandé de faire fissa.
-          Je pose quelques jours de congé, je loue un camion et me voilà. Y aurait-il un lit de camp dans un coin, si nécessaire ?
-          Pour une personne seule, on trouvera, ne ramasse pas d’autostoppeuse ou d’intérimaire en cours de route…
-          Tu fais bien de préciser ! Quoiqu’une paire de bras supplémentaire…
-          Stop ! File poser tes congés et aboule sans tarder, je m’occupe du reste.
Albert raccrocha. L’affaire se présentait bien pour lui et ce sacré Cinsault ne laissait pas de le surprendre. Mais un homme qui change de régime matrimonial comme de chemise peut-il, si on y pense bien, être tout à fait mauvais ?
René arriva le surlendemain avec un gros fourgon caréné qui eut un peu de mal à s’engouffrer dans la petite rue et à se garer valablement, moitié sur le trottoir, moitié caniveau et moitié rue. Car un homme tel que René ne pouvait qu’être à la tête de moult moitiés.
Charles était venu en renfort et il fallut d’abord vider les meubles de leur contenu, ce qui n’était pas rien, on voyait bien que les années avaient alluvionné en strates successives. Toutefois, l’ensemble était assez propre et rangé et il leur suffisait de mettre en caisses ou dans des cartons du linge et des bibelots dont ils étaient sûrs que René ne ferait pas usage. Ceux qui ont déménagé de temps en temps savent que, dans ce genre d’aventure, quand il n’y en n’a plus, il y en a encore. Et après encore, il y a encore et encore…
(à suivre...)

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