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dimanche 19 mai 2019

Chronique de Serres et d’ailleurs IV (36)


Auditrices et auditeurs qui m’écoutez, bonjour. Le 22 décembre dernier, en guise sans doute de cadeau de Noël, le gouvernement a promulgué une loi relative à la lutte contre la manipulation de l’information. C’est cette loi que d’aucuns appellent loi anti fake news.
Un premier point est à noter, cette loi n’utilise pas l’expression « fake news », ce qui est presque rassurant vu le gout immodéré de nos plus ou moins jeunes loupiots de la macronie pour les expressions anglo-américaines. Un deuxième point notable est que, d’après certains spécialistes, cette loi sera difficilement applicable, probablement peu efficace et potentiellement dangereuse pour la liberté de l’information.
Qu’est-ce donc qu’une fake new ? D’après mon dictionnaire anglais-français qui date d’avant l’utilisation massive de cette expression, le mot fake signifie trucage. Et le mot new (prononcer niou au singulier et niouze au pluriel) signifie nouveau au singulier et nouvelles au pluriel. C’est donc sous cette forme qu’on devrait l’utiliser et il ne faudrait donc par dire une fake new mais des fake news. Cela n’est pas simple.
Pour simplifier, je dirais qu’un fake, dans le langage des réseaux sociaux, est une sorte de faux nez, un pseudonyme, une fausse identité ou une identité usurpée. Et des fake news sont de fausses nouvelles déguisées en vraies nouvelles. Alors, comment arriver à démêler le vrai du faux ? Du temps de l’Union Soviétique, il y avait deux journaux officiels dont l’un s’appelait la « Pravda » (en français : la vérité) et l’autre les « Izvestia » (en français : les informations) et une plaisanterie russe habituelle était de dire qu’il n’y avait pas d’informations dans la vérité et pas de vérité dans les informations. Disons tout de suite que, du point de vue gouvernemental, une déclaration – par exemple – du ministre de l’Intérieur est une vraie nouvelle, une information indubitable autant qu’incontestable. Peu importe qu’elle ne soit pas exacte, c’est de la parole officielle et même s’il se rétracte quelques jours plus tard, il restera toujours quelque chose comme l’écrivait déjà Jean-Baptiste Rousseau dans son épître aux Muses : « Quelque grossier qu'un mensonge puisse être, / Ne craignez rien; calomniez toujours; /
Quand l'accusé
confondrait vos discours, / La plaie est faite; et quoiqu'il en guérisse, /
On en verra du moins la cicatrice. » Il semble que des membres proches des hautes sphères du pouvoir aient pu dire des vérités inverses sous serment. Et s’ils l’ont dit sous serment c’est donc que c’est vrai même si certains naïfs croient que cela est faux. On voit bien qu’une loi contre les fake news ne peut s’appliquer qu’au commun des mortels et non au pouvoir et à ses affidés. Une des dix règles de la musique d’ensemble est la suivante : « une fausse note jouée avec timidité est une fausse note. Une fausse note jouée avec autorité est une interprétation ». On peut en déduire qu’une fausse information affirmée avec autorité est parée de tous les atours de la vérité.
Finalement, on comprend que parler de fake news, c’est faire du neuf avec du vieux car on avait déjà un certain nombre d’expressions pour qualifier cela, qu’on les appelle fausses nouvelles, rumeur, délation calomnieuse, diffamation, propagande ou autre, c’est une pratique qui remonte à la plus basse Antiquité et déjà sous Cro-Magnon la calomnie avait progressivement remplacé le gourdin, c’est ce que l’on appelait à l’époque  l’évolution civilisatrice.
On voit par-là que certains pourraient envisager de remplacer la matraque par les fake news.

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