Auditrices
et auditeurs qui m’écoutez, bonjour. Pendant la campagne électorale, il est de
bon ton de ne pas aborder le sujet de la politique et, comme vous le savez, je
ne cherche jamais à déroger aux règles du bon ton. Or comme le printemps arrive
avec une impatience non dissimulée, je vais vous parler d’une des productions
les plus célèbres du Lot et Garonne, à savoir le pruneau d’Agen.
Pruneau
d’Ageng, ça vous va bieng, disait une publicité d’il y a déjà pas mal d’années
et même Louis Chedid s’était attelé à pousser une chansonnette publicitaire, charmante
et entraînante. Mais la prune à pruneau est une production qui remonte,
paraît-il aux romains. Ces derniers étaient moins fous que certains le pensent
car ils avaient posé le germe de ce qui allait devenir la production phare du
département. Par la suite, au XIIème siècle, les moines de l’abbaye de Clairac
ont eu l’idée de greffer sur les plants traditionnels des plans de pruniers de
Damas et donc venus de Syrie. Selon la légende, ce seraient les croisés qui,
défaits devant Damas, revinrent avec des plants, d’où l’expression « y
aller pour des prunes ».
La
prune à pruneau donc, de nos jours, est appelée prune d’ente puisque ce sont
des plants qui ont été entés, soit greffés. Les principaux porte-greffes sont
le Damas noir, le Saint-Julien ou le Franc mais celui que je préfère est le
myrobolan qui, à l’état sauvage, produit une charmante petite prune cerise,
très chargée sur l’arbre les bonnes années et dont je me plais à faire de
délicieuses confitures acidulées. Il y a aussi la prune de Saint Antonin que d’aucuns
appellent prune à cochon car c’était une prune cultivée là où on faisait paître
les porcs. C’est aussi une prune qui fait une confiture délicieuse qu’il n’est
pas utile de donner aux cochons.
Revenons
à notre pruneau. La culture en était traditionnelle mais dans un système
agricole bien différent de ce qu’il est aujourd’hui. Il était cultivé dans nombre
de petites exploitations, planté en bordure des quances qui étaient de petites
parcelles cultivées dont la superficie aurait correspondu à une journée de
labour. Beaucoup de fermes possédaient leur propre étuve qui était une sorte de
four où l’on faisait sécher les pruneaux. Bien sûr, tout cela est tombé en
désuétude et nombre de ces constructions ont changé de destination, tant et si
bien que leurs propriétaires en ignorent bien souvent l’origine.
Une
fois séchés, ces pruneaux, très prisés par les marins de haute mer car faciles
à stocker et riches en minéraux et vitamines, étaient embarqués au port d’Agen
sur des gabarres descendant la Garonne vers Bordeaux. C’est ainsi que la
réputation du pruneau d’Agen fit le tour du monde.
Rappelons
que, pour devenir un bon Lot et Garonnais, il faut être capable de répéter dix
fois de suite et rapidement la locution « pruneaux cuits, pruneaux
crus » !
On
voit par-là que la constipation, ce n’est pas pour nous.
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