Tuer le temps ?
Hélas il reviendra
Inexorable
Et nos vies s’écoulent.
1. Un tableau, un euro
Le train ralentit en arrivant dans une banlieue de petites maisons, d’usines et d’entrepôts. Des voitures et des camions traversent mollement les carrefours et donnent une impression d’activité ralentie. Les freins grincent, le roulis s’empare du wagon. On entre dans une vaste étendue de rails, de guérites et d’aiguillages. Des panneaux se succèdent « Poste 27 », des TER tagués paressent sur des voies de garage puis apparaît un début de quai avec le panneau « Saint-Lambaire ». Il est arrivé.
Il descend du train avec un léger sac de voyage. Sa malle et ses valises arriveront plus tard, dans un jour ou deux. Il sort de la gare et regarde autour de lui. Une vaste place coupée d’un long terre-plein, autour les immeubles sont pour la plupart neufs ou en construction. Quelques grands hôtels rutilent sous le soleil. L’arrivée de la nouvelle ligne à grande vitesse pousse au développement urbain de ce quartier.
Il est quinze heures, il a bien le temps d’arriver chez sa logeuse pour dix-sept heures. Il se dirige vers un bistrot sur sa droite. Il s’installe à une petite table, commande un café et sort de son sac un plan de la ville. Il se repère facilement, le quartier semble assez clair et il ne faut certainement pas plus d’une demi-heure à pied pour rejoindre la rue Équoignon.
Le garçon lui apporte son café. Il y met du sucre et tourne avec sa cuillère en regardant rêveusement autour de lui. Un couple de touristes avec de petits sacs à dos et des bâtons, des marcheurs certainement, prend un verre à la table voisine. Tous deux ont un aspect assez rustique avec leurs bâtons écorcés. Il suppose qu’ils débarquent de leur campagne, qui sait s’ils ne conduisent pas un troupeau de vaches avec leurs badines de maquignons. à une autre table, un jeune loup, habillé pardessus-costard-cravate, fait un exposé à deux jeunes filles fringuées commerciales. Au bar, un philosophe pensif met à mal un demi qui a perdu sa mousse. Les marcheurs se lèvent, l’homme paye les consommations au bar puis ils partent. Il revient une minute plus tard. Coiffé d’un panama fatigué, il récupère les bâtons oubliés dans un coin. Il sort et s’engage sur la chaussée sans faire attention, une voiture qui arrive avait cependant prévu le coup en voyant la canne blanche : elle laisse passer le supposé malvoyant.
Le voyageur pense qu’il va savourer la vie de province. Il se lève, paye sa note et sort sur la place agréablement chauffée par le soleil. Il se dirige en direction de la ville par une grande avenue longée de larges trottoirs. Il continue ainsi pendant dix minutes, puis tourne à droite et vérifie qu’il se trouve bien sur la rue du Général Comédon. Dieu seul sait sur quels soldats pouvait régner ce général, se dit-il in petto.
Il est maintenant dans un quartier résidentiel, avec de petits pavillons entourés de jolis jardins, puis de belles villas avec des porches et des vitraux en imposte. Ensuite, les rues deviennent plus étroites, avec des maisons en front de rue, sans jardins. Le quartier est plus ancien. Il arrive sur une petite place où un tabac-journaux et une boulangerie font face à une minuscule épicerie. Une rue à droite, puis une autre à gauche, le voilà rue Équoignon. Il passe devant un magasin d’informatique à l’angle, puis arrive rapidement au 51, chez Madame Lemond. Il s’arrête devant la façade en briques. En regardant la maison, il essaye de repérer où se trouve son appartement. Puis il jette un coup d’œil circulaire sur la rue, cela lui convient bien. Il s’avance et appuie sur la sonnette.
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