Ce livre est écrit sous forme d’autobiographie mais, en réalité, l’auteure s’efface pour donner la parole à Pierre Castède, son père. Il s’agit d’un vrai document pour l’histoire des gens du peuple et d’une description sociologique d’une petite région des Landes, entre l’Armagnac et la Grande-Lande, les Petites landes de Labrit et de Roquefort. La population décrite est celle des métayers qui vivent de la polyculture, de l’exploitation de la forêt de pins et de l’élevage des races traditionnelles. Ce livre se lit un peu comme un roman avec un personnage principal et sa famille. Mais il ne s’agit pas de héros de roman, simplement de personnages qui ont valeur représentative de leur petite société. Ce livre se lit agréablement, l’auteure, fille de paysans, est devenue enseignante rurale et elle a publié une demi-douzaine d’ouvrages dans la même veine.
Elle décrit pas à pas comment et de quoi vivaient ces gens entre la fin du siècle et la fin de la Grande Guerre. On avance au gré des saisons, avec les semailles, les sarclages, les récoltes, les battages. Et on voit au fil des années les enfants qui grandissent et qui, très vite, sont pris par les travaux de la ferme, chaque paire de bras comptant dans l’organisation de la vie. Mais le découpage du livre se fait en fonction des activités, de telle sorte qu’on fait le tour de tout ce qui fait cette vie de gens attachés –dans plusieurs sens – à la terre, cette terre qui n’est pas la leur mais sans laquelle ils ne pourraient vivre.
Toutes les activités, tous les évènements, font l’objet d’un paragraphe, on s’y retrouve facilement. Il est question des bœufs, des charrois, des marchands ambulants, du parler patois, de la construction des maisons et des granges, de la cohabitation dans la maison, des relations avec les bailleurs et bailleresses, des mariages, des fêtes… Mais il est aussi question de la misère, lou coarre en patois de là. Car elle est toujours présente, menace permanente pour qui ne s’en sort pas, et elle n’est surmontée qu’au prix d’un travail constant et acharné.
Pour la famille de Pierre Castède, tout ira bien et on sent venir une évolution qui leur permettra de dire à la fin du livre : « Ah ! Honnis soient les radoteurs qui assurent que autrefois on vivait mieux qu’à présent ! Plus de vin de grives mais du pinard à tous les repas et même le chabrot à discrétion après la soupe. Plus de pain noir mais du pain gris ou blanc. Plus de mendiants (depuis 1915). La résine fort chère ! De l’argent en suffisance ! Et la paix pour toujours ! Aou diable lou coarre , au diable la misère ! Et aou diable lou pan de blat é lou bin de tourts ! (Et au diable le pain de seigle et le vin de grives ! »
S’il est question de la guerre, des morts et des blessés, il est aussi question de la grippe espagnole, une maladie à virus –tiens donc !- que l’on tente d’éviter comme on peut, en diminuant les contacts, plus de messes, plus de marchés et plus de courses à Roquefort. L’histoire de cette grippe ne prend même pas une page. Heureusement qu’ils n’avaient pas nos média d’aujourd’hui ! Ils nous en auraient fait une sacrée tartine…
Cric crac, c’est tout et c’est une vraie histoire.
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