à ce moment, le grelot retentit, annonçant une visite. Une dame alerte quoiqu’assez âgée entre et est saluée par Raymond comme étant Madame Landau. Les présentations faites, Marondeau prend les dispositions pour fermer le magasin et ils partent ensemble vers un restaurant où ils partagent avec une grande convivialité un généreux plateau de fruits de mer. Puis, ils se quittent, Marondeau prenant bien soin de prendre rendez-vous avec Hervé pour le thé le surlendemain.
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Au jour dit, Hervé arrive ponctuellement chez Marondeau. Celui-ci lui propose d’emblée de jouer la belle au scrabble, après quoi ils pourront prendre le thé et parler de leur affaire.
Le jeu fut dominé par Hervé qui battit Raymond sans appel.
– Voyez, mon cher, dit Raymond, vous gagnez la belle et vous sortirez d’ici avec un très beau tableau, tout vous sourit, il faut savoir accepter ce que la vie vous donne de meilleur…
– Vous avez raison, mais je ne peux accepter de recevoir ce tableau ainsi…
– Rappelez-vous, mon cher, que j’ai déjà vendu une fois ce tableau. Je ne peux le revendre que pour une somme symbolique. Je ne suis ni un marchand de tapis ni un maquignon. J’ai enfin trouvé le bon dépositaire, c’est vous et il faut que vous preniez vos responsabilités.
Le grelot tinte et Hervé pense qu’il est momentanément sorti d’affaire mais il voit entrer Monsieur et Madame Landau. Marondeau les a invités à prendre le thé en tant que témoins de la transaction. Il veut qu’un contrat de vente en bonne et due forme soit signé avec le contreseing de deux témoins. Deux tasses de thé et quatre signatures plus tard, Hervé se retrouve propriétaire du tableau. Marondeau insiste pour qu’il soit livré par André qui vérifiera qu’il soit accroché comme il faut et où il faut.
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Le lendemain, Hervé voit arriver en bas de chez lui la vaillante fourgonnette d’André. Il descend lui ouvrir et ils montent avec le tableau qui prend la place d’honneur dans le petit appartement d’Hervé. Après le départ d’André, Hervé se retrouve seul face à son Leyden, nanti du certificat établi par l’expert. Il range soigneusement le certificat puis examine avec soin le petit tableau. La sereine mélancolie du paysage, la douceur des couleurs et la petite note de bleu clair lui plaisent. Seul, le gris teinté de noir de l’eau du lac semble exprimer une menace profonde, larvée, comme un appel du vide. Il ne sait quel sentiment lui inspire ce tableau, il ressent un appel, une demande et soudain il regarde le cadre, quatre larges barreaux noirs qui enserrent ce tendre paysage. Bien sûr, se dit-il, ce cadre ne lui convient pas. Il faut autre chose, il ne sait quoi, mais il se promet d’aller voir un spécialiste en la matière. Il demandera conseil à Marondeau, pour trouver l’encadreur compétent qui saura trouver avec goût ce qui conviendra à cette jolie œuvre d’art.
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