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jeudi 20 janvier 2022

Dernier tableau (60)

 

Oh, tu sais, ce n’est pas très long à lire. Je te dirai que je l’ai reçue ce matin et je l’ai déjà lue. Il fait une biographie de Leyden, puis un inventaire « non exhaustif » de ses œuvres suivi d’une bibliographie concernant les livres qui parlent de Leyden. Je l’ai lu dans l’après-midi, je te la fais passer dès que tu veux. Il est peut-être un peu tard pour te dire de venir la chercher ce soir, quoiqu’il ne soit pas encore six heures. Si tu la veux ce soir, tu peux manger ici, un peu à la fortune du pot, mais ce sera avec grand plaisir…


Hervé n’ose pas refuser, il se dit qu’elle sait s’y prendre, la garce, pour l’attirer chez elle, mais en même temps, c’est bien aussi ce qu’il espérait…


– Si c’est comme cela, je finis mon café et je chausse mes bottes de sept lieues pour venir chercher cette monographie. Et nous discuterons de cette randonnée.

– Bien sûr, alors je t’attends ?

– J’arrive, Sara, à tout à l’heure.


Il raccroche, finit son café et se prépare à partir. Il s’habille et sort discrètement de la maison afin de ne pas tomber sur Édith.

Il descend jusqu’au square Tocqueville, prend le boulevard puis la rue Onfray. Au numéro 27, il sonne et Sara vient lui ouvrir. Elle porte à nouveau la robe coupée dans un rideau, mais avec de légères sandales au lieu des lourdes Doc’ Martens qu’il lui avait déjà vues.


– Ah, je te fais marcher ! Mais tu aimes ça, non ?

– En effet, Sara. La preuve c’est que je suis là, vous le voyez…

– Entre, nous allons prendre un petit apéritif, tu verras que j’ai mis les petits plats dans les grands.

– Alors, comment allez-vous depuis hier ? demande-t-il en montant l’escalier.

– Oh, hier ! Je suis vraiment désolée, nous sommes partis sans te dire au revoir. Tu sais, je vais pouvoir faire une expo, une exposition, ici à Saint-Lambaire. Madame Le Blévec veut vraiment que j’expose. Elle va venir visiter mon atelier et ira à Morlaix, chez Lautort. C’est quelqu’un qui a du goût pour la peinture, j’en ai l’impression en tout cas. Pour tout dire, c’est elle qui le veut, son mari lui n’est pas très chaud. Mais je crois que cela pourrait marcher. Le député aussi trouve que ce serait une bonne idée. Bon, on verra. Tout cela pour dire que la discussion a duré un petit temps avec les Le Blévec et monsieur Lepetiot. Quand on a été prêts à repartir, je t’ai cherché et je ne t’ai plus vu. Tu es sans doute parti avant nous…

– Oui, j’ai discuté avec plusieurs personnes dont un journaliste qui m’a invité à déjeuner.

– Ah, mais alors, tu voulais voler la vedette au maire et au député ?

– Pas du tout, le journaliste avait déjà vu les officiels, il est revenu vers moi une fois son boulot terminé et il m’a invité au restaurant.

– Assieds-toi, que veux-tu boire ? Je te propose un Frontignan, ou alors classiquement whisky ou pastis.

– Eh bien, va pour un Frontignan s’il est frais, répond Hervé en s’asseyant dans le canapé.

– Il est frais, regarde en face de toi sur la table basse, tu as l’opuscule de Monsieur Estrade sur Leyden.

– En effet, Artur Leyden, une vie, une œuvre. Je peux donc le prendre, vous l’avez lu ?

– Oui, je l’ai lu, mais si tu continues à me vouvoyer alors que je te tutoie, on n’en finira pas, arrête cela s’il te plait, dit Sara en tendant un verre à Hervé.

à ta santé, dit-il en tendant son verre.

à la bonne heure, répond Sara. Alors, tu as mangé avec ce journaliste ? Il a dû chercher à te tirer les vers du nez, non ?

à quel sujet ? Lui, ce qui l’intéresse, à ce qu’il m’a dit, c’est de rencontrer des gens sur place, de savoir pourquoi ils sont là, de comprendre leurs motivations…

– Tu ne lui as donc pas dit que toi aussi tu possédais un Leyden ?

– Si, je le lui ai dit, mais je lui ai aussi dit que je ne voulais pas qu’il en parle dans son article.

– Demander cela à un journaliste, c’est lui demander l’impossible. Tu as intérêt à lire son journal pour voir s’il a été capable de tenir sa parole.

– Je compte bien lire son article, mais je crois que je peux lui faire confiance.

(à suivre...)

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