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mardi 7 mars 2017

AILLEURS - 1er prix du concours "Les Voyages imaginaires".



J’en ai vu, moi, des trains partir vers l’horizon
J’en ai quitté aussi, descendu sans raison
Vers une vague rive, une sombre lumière.
Sur les quais des gares, je voyais à l’arrière,
Rouge œil de cyclope, le fanal s’éloigner,
La gare déserte, tous s’en étaient allés.
Longtemps je restais là, les yeux fixant la voie,
Sous les caténaires, et seul dans le vent froid.
Trains partis dans la nuit vers des destinations :
Bordeaux-Vintimille, Saint-Etienne -Lyon,
De Paris à Irun, de Limoges à Paris,
Changement aux Aubrais, terminus au Perthuis.
Cri des rails qui grincent, des boggies qui claquent
Et des aiguillages où les roues craquent,
Les sifflets en gare, trompes de croisement,
Au fond des campagnes comme des mugissements.

Refrain :
Partir et tout quitter, partir pour un ailleurs,
Roulant vers l’inconnu, voguant vers un meilleur
Rêvant la croisière, infini voyageur,
Visant un autre part, volant vers le bonheur

Je le croisais chaque jour sur le quai désert
D’où partaient ces cargos, ventrus et mercenaires.
Et puis on s’est parlés, il m’a tout raconté,
Les mers en furie, l’océan déchaîné.
Il partait pour des ports vers des Amériques,
Veracruz, Tampico, ces villes du Mexique,
Pour les grands archipels, Hawaï ou La Sonde,
Sur un pétrolier pour un tour du monde,
Bourlinguant sur un brick, affrétant des dragues,
Passager clandestin fuyant dans la vague
Sur une corvette cinglant pleines voiles,
Prenant le fil de l’eau, visant une étoile,
Mourant à chaque fois sur le flot fantasque
Paré à renaître après la bourrasque.
Il parlait sans cesse décrivant les vaisseaux
Poursuivant la lame sur les fonds abyssaux

(refrain)

C’est ainsi que nous allions, lui, moi, tous deux,
Voir partir les avions s’envolant vers les cieux,
Le terminal ouvert comme une esplanade.
Et tel un musicien pour la sérénade
Je me tenais debout, les jumelles pointées
Mirant les grands oiseaux, départs et arrivées,
Fiumicino-Orly, Venizélos-Roissy,
De Cointrin à Schiphol, Kennedy à Grozny,
Airbus ou Antonov, réacteurs vrombissants,
Boeing ou Tupolev, quadrimoteurs hurlants,
Sillages dans le ciel, sifflets dans les oreilles.
Lui et moi fascinés par des nuits sans sommeil
Passées à animer les salles des pas perdus
Où reposaient fébriles des migrants éperdus.
Après ce festival, muets nous repartions
Touristes fantômes, voyageurs d’illusion.

(refrain)


© Pierre Jooris



3 commentaires:

  1. " Touristes fantômes, voyageurs d’illusion."

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  2. Passer frontières sans quitter le salon....voilà qui est fait! Merci... Béné Méri chanteuse

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