Auditrices
et auditeurs qui m’écoutez, bonjour. Nous venons de changer d’heure et le
moment est fort bien venu pour parler du changement. Mieux vaut penser le changement que de changer de pansement, disait
Francis Blanche. Si les temps ont bien changé depuis, on n’arrête pas de penser
le changement : l’actuel président de la république s’est fait élire sur
le slogan « Le changement, c’est maintenant » et le précédent
revient en disant « J’ai changé et le changement c’est moi ».
Le changement est devenu le maître mot de la communication
politique et d’aucuns ont proposé comme slogans « le changement, c’est
tout le temps » ou encore « Changer le changement ». Ou aussi
« le changement dans la continuité » et comme ce
député : « La permanence du changement, c’est le changement de
permanence ».
Dire que le changement c’est maintenant est une formule fort
habile. En effet, maintenant est pérenne, à l’instar de demain qui ne meurt
jamais et des diamants qui sont éternels. Monsieur H* est donc bien le James
Bond de la politique et Monsieur S* son Dr No, ou inversement. Quand je parle
de monsieur H. et de monsieur S. vous aurez compris que ces personnages sont
fictifs et anonymes.
Mais qu’est-ce qui peut donc pousser les électeurs à se
prononcer en faveur du changement alors que la majorité d’entre eux souhaite
surtout que l’on ne réforme rien et que tout reste dans l’état, même
déplorable, où il se trouve ? Le français moyen veut que la baguette reste
la baguette, que le béret reste le béret et que les politiciens restent des
politiciens. Où irions-nous si tous les politiciens se mettaient à être
intègres, à l’écoute de leurs administrés et à tenir leurs promesses ? Ce
serait un scandale intolérable car de qui le français moyen pourrait-il dire
tout le mal possible ? Les turpitudes du personnel politique sont aussi
nécessaires à monsieur Tout-le-monde que l’air qu’il respire. En dénigrant ses
élus, ce dernier évite de voir sa propre insignifiance et ses propres défauts.
Tout se passe comme si ces élus étaient des corps étrangers dont on ne sait
d’où ils viennent alors qu’ils sont la simple émanation de leur électorat. Et nombreux sont les
électeurs qui, dans leur for intérieur, aimeraient se nourrir d’avantages
exorbitants, de grasses prébendes et d’honneurs indus s’ils étaient à la place
de ceux qu’ils critiquent.
On voit par-là que, comme l’écrivait Giovanni Tomasi di
Lampedusa dans Le Guépard, « il faut
que tout change pour que rien ne change ».
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