— Eh bien, il t’a à la
bonne, le Monsieur Henri ! Tu serais vraiment kiné alors ? Dis-je une fois que
j’ai démarré et passé la grille.
— J’étais kiné, j’avais
un petit cabinet en libérale à Veyriat, c’est à une vingtaine de kilomètres, me
répond Magali.
— Et tu as arrêté ?
— Ça, c’est une longue
histoire, je te la raconterai mais il me faut du temps.
— En tout cas, tu m’as
donné un sacré coup de pouce tout à l’heure, je ne t’avais pas entendu arriver.
— Ce qui prouve qu’il
vaut mieux que je ne te quitte pas d’une semelle, dit-elle en riant.
— Raconte-moi ton
histoire au lieu de faire des déductions vaseuses.
— Il était une fois, une
jeune fille qui, après le bac se posait une térébrante question : que vais-je
faire après le bac. On lui avait dit : « passe ton bac d’abord », comme à toute
une génération. Et pour l’après, elle n’avait aucune idée de ce qu’elle allait
faire. Si elle avait pu travailler tout de suite, elle l’aurait fait, mais
derrière, il y a les parents et la pression de la famille. Donc, un peu par
hasard, elle passe le concours pour entrer dans une école d’infirmières et pas
de bol, ça ne passe pas. Du coup, elle passe le concours pour entrer dans une
école de kiné, et voilà le travail, elle obtient le diplôme et fait des
remplacements en institutions. Puis, le temps passant, elle a envie d’ouvrir un
cabinet. Car si elle a choisi ce métier un peu comme cela, elle a suivi ses
études avec passion, de bons profs et une vocation qui se découvre. Donc elle
choisit de s’installer dans un village de l’Aveyron, Veyriat, où elle a trouvé
une maison qui lui convient parfaitement. Comme il était difficile d’emprunter,
ses parents ont emprunté pour elle. Et elle a pu ainsi ouvrir un petit cabinet
de kinésithérapie à Veyriat. Le cabinet tournait bien, l’argent rentrait.
Quelques années passent et un jour, les parents ont un accident de voiture
grave et décèdent. Je passe les détails. La jeune fille est héritière ainsi que
son frère ainé. Les parents vivaient dans un appartement de location et la maison
de Veyriat était à leur nom, donc à partager. Une fois de plus, je passe les
détails. La maison de Veyriat a été mise en vente, le frère ainé voulant sa
part d’héritage. C’est à ce moment que la jeune fille, une jeune femme maintenant,
rencontre un jeune homme nommé Michel, qui lui fait une cour assidue. C’est un
obstiné, ce Michel. Et il lui propose de venir s’installer dans sa maison. Il
lui promet de faire des travaux afin qu’elle puisse y ouvrir un nouveau
cabinet. Et la jeune femme, dépressive depuis la mort de ses parents, se laisse
convaincre. La maison de Veyriat est vendue et elle s’installe chez Michel. Il
a eu ce qu’il voulait, Michel, mais les travaux promis ne seront jamais
réalisés. Et la jeune femme s’enfonce dans la dépression. Avec pour seul
dérivatif la fumette que lui procurent les copains qui viennent envahir
périodiquement la maison. Et là encore, le temps passe. Le couple se délite doucement.
Michel se met à galoper derrière une autre. Certains disent qu’il l’a
rattrapée. Et me voilà dans ce fourgon, tu connais la fin de l’histoire.
— Et tu as bouffé ta part
héritage, bien sûr, dis-je.
(à suivre...)
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