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lundi 30 juillet 2012


Chronique du temps exigu (14)
Jeudi, il y a eu un peu de retard à l’allumage et donc je vous ai livré un passage de mon livre qui devrait sortir début 2013. La suite du passage incessamment sous peu, bien sûr.
Mais que s’est-il donc passé pour que le Toscanini du compresseur-Diesel-deux-temps-à-démarrage-manuel ait ainsi négligé de livrer une chronique ?
La réponse est simple : il était fort occupé à faire ch… les c… . De qui, de quoi ? De quoi s’agit-il ? Pourrais-tu prononcer tout cela plus clairement ? Bon, disons que je tentais de mettre un grain de sable dans la machinerie infernale de la stupidité républicaine. Et cela peut prendre du temps ! Non qu’il soit difficile de trouver un grain de sable mais parce qu’il n’y a pas l’épaisseur d’un papier à cigarette entre les rouages de la médiocrité démocratique.
Il s’agit bien d’un mécanisme huilé, implacable et reproductible à l’infini. Bien sûr, l’élu sensé fait l’orgueil de la Nation, mais point trop n’en faut. La Nation s’en voudrait de pécher par orgueil…
Mais foin de tout cela, rappelons ce que disait notre ami Marondeau (cf. 3 juin) :
« Voyez, vous et moi, qu’irions-nous nous salir l’esprit avec ces débiles et leurs électeurs alors qu’il y a tant de belles choses à regarder, de choses intéressantes à faire et de belle musique à écouter ? ».
Vous avez donc quelques tournesols à déguster des yeux et un poème, devinez de qui ?

Elle était riche de vingt ans,
Moi, j’étais jeune de vingt francs,
Et nous fîmes bourse commune,
Placée à fonds perdu, dans une
Infidèle nuit de printemps…

La lune a fait un trou dedans,
Rond comme un écu de cinq francs,
Par où passa notre fortune :
Vingt ans ! Vingt francs !... et puis la lune !

-En monnaie – hélas – les vingt francs !
En monnaie aussi les vingt ans !
Toujours de trous en trous de lune,
Et de bourse en bourse commune…
-C’est à peu près même fortune !
(…)

jeudi 26 juillet 2012

Un court extrait de mon prochain bouquin:

Le temps est gris mais sans promesse de pluie, il s’habille en marcheur et part prendre le bus en direction de Cancale et descend à mi-chemin, à La Brémarde. Dans un bourg, il s’achète deux beaux sandwiches ainsi qu’une bouteille d’eau et il part sur le sentier des douaniers.
Ce sentier est magique en toutes saisons, mais il est féerique en hiver lorsque la brume pose ses flocons géants ça et là. La marée est montante et il se sent ivre de cette beauté subtile. Le chemin suit un haut de falaise, puis brutalement descend vers une petite crique qui se prolonge en une sorte de ria profonde. Il marche sur le sable d’une étroite bande de plage qui borde cet aber, puis, après plus de sept ou huit-cents mètres, cette bande de sable se transforme en un magma boueux sur lequel sont mollement couchées quelques barques tenues par de longs filins eux-mêmes attachés aux arbres poussant sur le haut talus qui surplombe cette bande boueuse. Il voit bien que la vallée se rétrécit et que les eaux montent, mais il ne peut que continuer en espérant trouver un passage, une rampe qui lui permettra de monter sur le talus.
Ses chaussures deviennent lourdes de cette gadoue collante et il a de plus en plus de mal à avancer alors que la marée envahit rapidement les lieux, faisant frissonner les petites barques au bout de leurs amarres. Il hésite un moment à monter dans une de ces embarcations, mais non, c’est stupide, il va arriver à trouver une issue.
La marée continue à monter assez vite et il progresse  de plus en plus difficilement, l’intérieur de ses chaussures est gorgé d’eau salée et le bas de son pantalon est détrempé. Il prend un filin et tente d’escalader le talus en s’aidant de celui-ci. Mais le talus est raide et sableux, le terrain se dérobe sous ses pieds, il lâche prise. Et l’eau monte encore.
(à suivre...)

dimanche 22 juillet 2012


Chronique du temps exigu (13)

Bon nombre de maladies graves nous viennent de l’étranger. Pour ne parler que de nos plus proches voisins, les Allemands nous ont envoyé l’Alzheimer et la Creutzfeldt-Jakob, les Britanniques la Parkinson. Y-a-t-il donc des maladies de ce genre spécifiquement françaises ? Hormis le syndrome de Gilles de la Tourette, qui porte un nom charmant, quel est donc la maladie que nos voisins pourraient nous reprocher ? D’autant que le syndrome précité est souvent associé à une certaine coprolalie de souche bien gauloise et que nous nous gardons précieusement.
Quant aux Etats-Unis, ils nous ont envoyé une maladie étonnante, la crise dite des subprimes, astucieuse dégénérescence financière qui permet aux banquiers et assureurs d’oublier qu’ils ont spéculé de manière hasardeuse. Cela leur autorise, en se faisant refinancer par le budget de l’état, de prendre de l’argent non plus seulement dans la poche des épargnants mais aussi dans celle de tous les contribuables payant de l’impôt direct ou indirect.
Il est grand temps que nous trouvions le moyen de nous distinguer parmi le concert des nations, que nous trouvions aussi une maladie qui fasse notre renom ou imaginions quelque tumeur comptable susceptible de renflouer les caisses des riches. Ne soyons, que diable, pas en reste !
On voit par là qu’il n’est pas simple de se distinguer.

jeudi 19 juillet 2012


Chronique du temps exigu (12)
On n’arrête pas le progrès en marche. Pas plus que l’on n’arrête sa course. Il est évident que le progrès va, court et vole de son propre zèle.
Le niveau monte et des scientifiques de toutes farines et de toutes obédiences publient de manière régulière d’étonnantes découvertes. Jusqu’où ira-t-on, peut on se demander à juste titre ? Mais jusqu’où n’ira-t-on pas aussi ? Qu’est-ce qui fait que ce progrès tant vanté, lancé comme une locomotive, n’entraîne pas à sa suite tous les wagons de l’esprit humain ? Car il faut le dire : si de plus en plus de grands esprits paraissent briller au firmament de la science et de la technique, ces derniers semblent laisser sur le bord de la route tant et plus de pauvres cervelles démunies et ignorantes de l’expansion du progrès…et c’est ici que je dois arrêter mon élan.
En effet, je comptais livrer une chronique sur la médiocrité, qu’elle soit intellectuelle ou non. J’avais écrit plusieurs lignes et en me relisant, je constate que la médiocrité est contagieuse. Je relis ces quelques lignes (supprimées depuis) et suis frappé par la médiocrité de mon texte. Ne peut-on fustiger la médiocrité que médiocrement, avec des phrases et des pensées banales et mesquines ? La médiocrité se défend-elle en contaminant celui qui voudrait la fuir ?
La médiocrité intellectuelle est-elle inéluctable ? On peut le craindre, il n’y a pas de places pour tous dans les fourgons du progrès. Et on en arriverait même à penser que le progrès, en tirant la médiocrité vers le haut la rend ainsi encore plus minable (tel qui pensait devenir un haut personnage le matin en se rasant se montre bien trivial en nous barbant le soir) et l’on peut voir que des découvertes géniales peuvent se transmuter en applications insignifiantes dans les mains d’individus sans qualités.
On voit par là qu’il faut taire ce dont on ne peut parler.

jeudi 12 juillet 2012

Pour fêter la millième consultation du blog, je vous propose un extrait d'une nouvelle qui paraîtra peut-être un jour:

"Le chemin partait raide, attaquant la montagne légèrement en oblique. Ce chemin s’inscrivait en creux dans le relief, ce qui permettait de le suivre sans s’en écarter surtout dans le bois où la clarté se dissipait.
Il marchait, rassuré par le contact du bâton, des pierres roulaient sous ses pieds. Léon craignait de se faire mal ou de ne pas tenir le coup. Il manquait d’entraînement à la marche, surtout en montagne et il savait qu’il suffit de peu pour se fouler une cheville.
Il montait, l’attaque était rude et la journée commençait, sévère, par cette montée dont il ne pouvait voir la fin. De temps en temps, de plus grosses pierres l’obligeaient à faire un écart. Le seul bruit venait de ses pas et de cailloux qui roulaient, pas encore un oiseau, pas un bruit ne montait de la plaine.
Il grimpait, le bâton serré dans sa main droite, lui donnant des poussées pour soulager ses jambes. Léon n’avait jamais imaginé un début de journée aussi dur. Enfin, une lueur commença à s’insinuer entre les sapins, Léon voyait maintenant que le sol était seulement couvert d’aiguilles et de branches mortes. Il sentit une vague d’énergie monter en lui, il entendit chanter un oiseau. Se retournant, il vit à travers les arbres pointer un  début de disque solaire. Il repartit, les jambes légères et respirant à pleins poumons.
Il sifflait, doucement pour ne pas troubler la montagne, la forêt, les animaux. Un rayon de lumière passait entre les branches, le chemin, toujours à flanc de montagne, partait à plat en suivant une courbe de niveau. Le bois se garnissait maintenant de feuillus épars et des buissons de myrtilles couvraient, par plaques, les bords du chemin. Léon s’arrêta pour regarder vers la vallée, vers l’orient. Toute la plaine commençait à frémir sous le lever du soleil.
Il frémissait avec la nature, se sentant devenu nain en elle et géant par elle."

mardi 10 juillet 2012


Pour « fêter » la millième consultation du blog, je vous proposerai jeudi un court extrait de ma première nouvelle. Elle n’a pas été publiée mais j’espère pouvoir finir une autre nouvelle et les publier dans un recueil.
J’ai créé ce blog pour faire la promotion de « René-la-Science », roman-fantasia édité à compte d’auteur. C’est l’histoire d’un maçon, Fortunio, qui croit passer quelques jours de vacances tranquilles chez un ami dans le Sciéraquois. Mais les circonstances vont le pousser à inventer un trésor, à le négocier et à jouer le chevalier blanc. Tout cela sous la bienveillante tutelle de son ami René, dit « la-Science ». Et pour le plus grand profit de ce dernier.
Aujourd’hui, ce livre vit sa vie, il a donné du plaisir à ceux qui l’ont lu, il est en vente dans les bonnes librairies et j’espère que j’arriverai à écouler mon stock.
Dans quelques mois sortira un autre roman « Loin de la douleur passée ». Une autre histoire, bien différente, celle d’un récent retraité qui lui aussi va être pris par des circonstances qui lui permettront d’élucider un passé tragique. Mais au travers d’un présent souvent cocasse.
Et après, comme je le dis plus haut, deux nouvelles que j’espère terminer bientôt.
Et j’essayerai de continuer cette expérience de blogueur en continuant, tant que je le pourrai, à vous livrer quelques chroniques sur ce blog, dans le temps exigu qui nous est imparti

lundi 9 juillet 2012


Chronique du temps exigu (10)
Un train peut en cacher un autre… cette phrase lapidaire a fait rêver bien des gens arrêtés à un passage à niveau. En effet, un train normalement en retard sur l’horaire peut en cacher un autre qui arriverait sournoisement à l’heure. Le piéton (ou le cycliste) qui traverse le passage à niveau n’imagine pas qu’un train puisse arriver à l’heure, ce dernier étant de plus obligé de se cacher derrière un autre pour ne pas se faire voir.
Le retard des trains est une source inépuisable de découvertes culturelles pour qui a la chance de s’y pencher.
Vous est-il arrivé d'être dans un train quand tout à coup des haut-parleurs situés on ne sait où dans le wagon se mettent à éructer une annonce bruyante et incompréhensible ? Après un coup d’œil à votre montre, vous supposez que l’on vous apprend que votre train aura du retard sur l’horaire annoncé, que le président de la société ferroviaire viendra en personne vous tenir la main pour prendre votre correspondance et qu’une agréable collation sera servie en compensation du préjudice subi. Légère déception, seule la première de ces suppositions se révèlera exacte.
J’ai eu la chance dernièrement de voyager au côté d’un sémiologue érudit qui a longuement analysé ces éructations ferroviaires et qui a fait une découverte étonnante. Ces messages que nous entendons dans les trains ne sont nullement en langue française ni en une autre langue en usage dans nos pays occidentaux. Il s’agit en fait d’une langue hiéroglyphique non écrite et uniquement émise par ce que l’on appellera une voix. Cette langue n’est pratiquée que par des locuteurs ignorant la signification de ce qu’ils disent mais ayant bien la sensation d’avoir une parole imagée autant que sensée.
On voit par là que les agents du chemin de fer ne diffèrent guère, sur ce point précis, du commun des mortels.

vendredi 6 juillet 2012


Chronique du temps exigu (9)
La vie à la campagne n’a pas que des inconvénients, elle réserve aussi des surprises agréables. Parmi celles-ci, la découverte (et le ramassage) des champignons. Bien sûr, il n’y en a pas qu’à la campagne. A Paris, il y a les champignons dits de Paris qui ressemblent, serrés dans leurs barquettes, aux Parisiens dans leurs métros. Il traîne aussi dans la capitale quelques mycoses et autres mérules mais là n’est pas notre propos.
Le champignon a longtemps excité l’imagination des dessinateurs qui le font cohabiter avec le petit peuple des bois et des forêts. Il a aussi été le fantasme de cohortes de babas et autres pileux à sandalettes en tant que pourvoyeur d’hallucinations. Meurtrier parfois, il a aussi fait rude violence à bien des intestins de ramasseurs imprudents.  
 
Dans les prés, le doux rosé émerge de l’herbage et l’ample coulemelle déploie avec majesté son ombrelle déguenillée. Le faux mousseron, doux marasme d’oréade se répand en ronds de sorcière dans l’herbe rase et le coprin chevelu érige sa cloche claire.
Dans les bois, le clitocybe et la chanterelle d’automne créent des taches de couleur dans les feuilles mortes. Le cèpe, dodu et parfois imposant parfume les sentiers et la lumineuse girolle éclaire le sous-bois. La trompette de la mort s’organise en troupes sombres et le pied-de-mouton scintille doucement sous les feuillus. Ailleurs, lactaires et oronges brillent de tous leurs feux.
Et dans les assiettes, en sauce, sur une croûte ou farcis, ils sont le régal de qui sait les aimer.
On voit par là que la vie à la campagne n’est pas de tout repos…

mardi 3 juillet 2012


Chronique du temps exigu (8)
 
Où l’on en remet une couche…

L’humour a-t-il un prix ? Plus aucun maintenant que les émoticônes sont gratuites.
Dans un roman de Huxley, il y a un personnage qui se ferait pendre plutôt que de se priver d’un bon mot. C’était une autre époque, celle où vous pouviez vous faire virer du collège pour mauvais esprit… et ceci est un simple exemple.
Imaginons une conversation. Vous êtes gourmandé par un gendarme sous l’œil d’un passant :
-         Monsieur, dit le pandore, vous avez commis une infraction, je vais vous enlever un point.
-         Quoi, répondez-vous, vous voulez prendre mon point ?
-         Monsieur, vous dit-il en retour, vous me menacez ?
Vous pensez avoir fait de l’humour. Le passant, observateur plus ou moins neutre, y a vu de l’ironie. Quant au représentant de l’ordre, il y verra dans le meilleur des cas du persiflage et dans le pire, une menace. Vous avez courageusement bravé l’autorité en risquant de vous faire accuser de rébellion.
Aujourd’hui, vous ne risquez plus rien. Allez donc voir sur le vèbe. D’après l’Institut Périamétri, plus de soixante-dix pour cent des phrases échangées dans les forums de discussion finissent par ce bizarre assemblage appelé émoticône formé du deux points – tiret sous le six – fermeture de parenthèse, aussi appelé « smiley ».  D’après Médiapétri, on passerait même les quatre-vingt pour cent ! De fait, bien des émetteurs de messages qui ne comprennent pas leur propre message, se satisfont de ce petit drapeau pour dire : «  c’était pour rire ». Et bien d’autres agitent ce drapeau au cas où il y aurait de l’humour dans ce qu’ils ont écrit. Et je n’ai pas encore parlé de l’expression « Lol », d’origine douteuse quoiqu’anglo-saxonne (à moins que cela ne soit le contraire ?) que d’aucuns traduisent par « mort de rire ». De nos jours, il y a plus de gens qui ressuscitent après ce genre de décès que d’individus qui trépassent. L’humour, comme le crime, ne paie plus.
On voit par là que quand l’humour n’a pas de prix, il est aussi sans valeur.

dimanche 1 juillet 2012


Chronique du temps exigu (7)

J’ai fait un rêve absurde… je vivais dans une ville, une ville agréable avec de grandes et belles avenues, de vastes places agrémentées de parcs, de jolies rues avec des maisons pimpantes, des venelles typiques et des passages mystérieux. Puis, autour de la ville, il y avait des faubourgs et des banlieues laborieuses qui donnaient sur une campagne riante avec des chemins de traverse.
Cette ville avec son arrière-pays, c’était ma langue française, la nôtre, avec sa grande syntaxe, sa grammaire touffue, ses mots pittoresques et son orthographe complexe. Puis, dans les alentours, le jargon de nos métiers et l’argot populaire. Enfin, les patois des pays et, plus loin encore, les travers bénins de notre parler quotidien. J’étais dans la patrie d’Albert Camus, notre langue française.
Et, toujours dans le même rêve, je vis alors arriver le cauchemar. Je vis venir la langue de la toile, cette langue tapée sur des claviers borgnes et sans âme. Je me voyais parcourir les mêmes avenues défoncées d’une syntaxe fracassée,  dans de vastes places remplies d’immondices de la grammaire oubliée, dans des rues aux façades douteuses de mots incompris et dans des passages souillés des déchets d’une orthographe perdue. Autour de la ville nulle ordure n’était plus ramassée et un sabir douteux souillait le pavé luisant de graisse. Des hordes barbares avaient-elles soudain envahi ma patrie ?
Non, les barbares étaient de notre race, se croyaient de notre patrie et de notre langue…Je me sentais devenu un étranger dans ma patrie.
Vous voyez bien, c’était vraiment un rêve absurde.