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dimanche 31 décembre 2017

Chronique de Serres et d’ailleurs III (15)



Auditrices et auditeurs qui m’écoutez, bonjour. « Chacun sa merde » ainsi parlait Sara Toussetra, buraliste émérite et accorte marchande de journaux. Bien sûr, un tel adage se comprend bien : que chacun s’occupe de ses problèmes car chacun a les siens. Il est certain qu’elle exprime par-là une opinion de droite, peut-être même de la droite libérale car les socialistes ou les gens de gauche pensent de même mais ne le disent pas tout haut.
S’il fallait que chacun s’occupe de sa merde, où irait-on cependant ? De nos jours, il y a des entreprises qui s’occupent de cela, chacun tire la chasse en se débarrassant de ses excédents en comptant bien sur le fameux aphorisme d’Héraclite « Tout s’écoule », Πάντα ῥεῖ dans la langue d’origine. Au-delà de la cuvette, il y a un réseau de tuyaux qui aboutissent dans un égout, puis ces égouts se répartissent eux-mêmes en collecteurs primaires puis en collecteurs principaux pour aboutir dans une station d’épuration. Dans ces stations, l’eau est traitée et restituée au réseau de ruisseaux, de rivières et de fleuves qui renverront cette eau enfin pure à la mer et aux océans. Reconnaissons qu’autrefois les égouts débouchaient directement dans les rivières ou fleuve et même directement à la mer sans passer par la case station d’épuration. Gageons que maintenant il n’y a plus de rejet direct d’effluents non traités.
Mais, entends-je dire tout bas, vous ne parlez que des effluents des villes, bourgades et villages : il y a bien des maisons dans les campagnes ou certains lotissements qui ne sont point raccordées à ces réseaux, faute de possibilité. Eh bien, répondrai-je tout haut, vous avez parfaitement raison et c’est pour cela qu’il existe une institution qui surveille l’installation et la conformité des assainissements individuels, autrement dit les assainissements non collectifs. Le fait de préférer dire non collectif permet de mettre en évidence toute l’étrangeté de ces installations où chacun gère ses propres effluents alors que, contrairement à ce que déclare Sara, la merde est un bien traditionnellement collectif. Il y a donc un service public qui permet de contrôler les installations individuelles, c’est-à-dire que de temps à autre un agent se promène dans la campagne pour obliger les uns à faire ce que les autres se dispensent de faire par ailleurs puisque cet agent n’aura pas le temps ni l’heur de vérifier toutes les installations, pressé qu’il est de retourner au chaud dans son bureau où l’attendent la machine à café et les réussites sur son ordinateur.
Ah, il est loin le temps où, à la campagne, on allait poser l’hiver sa déjection dans l’étable sur un peu de paille afin qu’elle rejoigne le généreux fumier des vaches qui suintait en tas fumant à l’extérieur, exhalant une vapeur prometteuse. Les paysans aisés, raccordés au téléphone, se torchaient avec les 365 pages de l’annuaire de l’année précédente, pages jaunes comprises et la couverture pour les années bissextiles. Les paysans moins fortunés utilisaient les sacs en papier d’aliments pour les petits poulets. Et l’été, c’était la vigne qui récupérait l’offrande intestinale.
Ah le progrès ! On se demande bien si c’en est un de diluer aujourd’hui ce qui hier servait à régénérer les sols. Maintenant les antibiotiques, les psychotropes et autres joyeusetés chimiques polluent ce qui ne peut plus servir d’engrais mais devrait être renvoyé aux firmes pharmaceutiques qui produisent tout cela.
On voit par-là que, quand la merde vaudra de l’or, le cul des pauvres ne leur appartiendra plus. (Henry Miller)

jeudi 28 décembre 2017

René-la-Science (82)



— Bonjour, monsieur Fortunio me répondit-elle.
— Tu peux m’appeler par mon prénom, Albert, puisque je t’appelle par le tien.
— Moi c’est Esther Fauchet, dit-elle.
— Revenons à nos fleurs, me conseillez-vous de belles roses, mademoiselle Fauchet ? Dis-je.
— Oui, monsieur Fortunio, quelle couleur préférez-vous : rouge vif, rose, blanche… ?
— Vous en avez des jaunes aussi, elles sont très belles, dis-je. Mais les blanches me plaisent beaucoup. Je vais prendre des blanches, un bouquet de roses blanches.
— Nous allons vous préparer cela, monsieur, vous verrez, la dame sera très contente.
Je repartis à rire. Esther avait déjà pris les roses et partit vers le comptoir où elle se mit en devoir de les recouper, de les arranger et de les garnir d’un peu de verdure d’asparagus. C’est Sylvie qui intervint pour emballer et pour la présentation finale.
— Esther fait ses débuts comme vendeuse, qu’en pensez-vous ?
— Elle sera très vite au top, comme sa mère. Qui sait si dans peu de temps elle ne vous en remontrera pas ? Dis-je. En tout cas, je suis certain qu’elle a été à bonne école et je te félicite, Esther.
— Merci, monsieur Fortunio, répondit-elle. C’est vraiment votre nom ?
— C’est un petit nom, un nom de fortune. Mais Albert, c’est mon vrai prénom.
— Et ton vrai nom alors ?
— Je m’appelle Forelle, Albert Forelle. Comme cela tu sais tout.
— Forelle, comme la truite ?
— Ah ! Oui en effet. Tu fais de l’allemand en classe ?
— Maman a des cousins en Allemagne et j’y suis déjà allée deux fois. Il y a des truites en Allemagne.
— Voilà, et moi je suis une truite du sud-ouest qui achète des roses chez toi, dis-je en souriant.
— Voilà votre bouquet, monsieur la truite Fortunio, dit Sylvie. C’est soixante francs.
Je sortis un billet de cent francs et Esther me rendit ma monnaie.
— Je vous croyais reparti en Lot et Garonne, me dit Sylvie.
— J’y étais la semaine passée, mais je suis revenu saluer mes amis et récupérer quelques affaires, je ne sais pas si je vais rester bien longtemps.
(à suivre...)

dimanche 24 décembre 2017

Chroniques de Serres et d'ailleurs - Noël


En cette veille de Noël, un bref message pour remplacer une chronique déplacée.

Auditrices et auditeurs qui m’écoutez, bonjour. La fin de l’année arrive, le grand Saint-Nicolas vient de passer et le Père Noël a chaussé ses bottes de sept lieues, attelé ses rennes par les rênes et enfilé sa hotte et sa houppelande pour partir de Rovaniemi en Finlande et arriver au cœur de la Gascogne, viser les cheminées de nos chaumières et déposer moult cadeaux sous le sapin et au creux de nos pantoufles. Puis l’année nouvelle nommée 2018 arrivera tout doucement, parfois sous la neige, ponctuée des pops des bouteilles de champagne, des éclatements de pétards et des claquements de bisous.
Alors, à vous tous qui nous écoutez, à CoolDirect et toute son équipe et à tous ceux qui ne peuvent pas nous écouter mais qui en meurent d’envie, je vous souhaite de passer de bonnes fêtes de fin d’année bien au chaud dans votre maison ou au grand air bien couverts à vous promener tranquillement. Je vous souhaite de vous régaler de bonnes nourritures et de boissons acidulées ou fermentées, toujours avec frugalité et modération. Je vous souhaite de répandre la joie et le bonheur autour de vous. Je vous souhaite aussi d’écouter de la bonne musique, de préférence sur notre bonne webradio.
Pour l’année qui vient, vous aurez la santé, la bonne, celle qui est de fer. Vous aurez tout le bonheur que vous accepterez de vous accorder. Vous aurez la joie de vivre et d’aimer autour de vous.
Bonnes fêtes, bonne année 2018 et on voit par-là que le temps passe et ne s’arrête pas.