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dimanche 25 février 2018

Chronique de Serres et d’ailleurs III (23)



Auditrices et auditeurs qui m’écoutez, bonjour. Enfin les voilà, ils sont de retour ! Je veux bien sûr parler des jeux olympiques d’hiver, cette feria sur neige et sur glace qui émerveille notre population tous les quatre ans et qui fait le régal de nos commentateurs sportifs télévisuels, radiologiques ou bistromaniaques. Cette année, ils se déroulent, comme le tapis rouge d’Agamemnon, en Corée du sud, plus précisément à Pyeongchang. Le nom de cette ville est plus facile à prononcer après quelques verres de quelque boisson fermentée mais je suis tenu de diffuser ma chronique à jeun et j’espère que vous excuserez ma prononciation approximative.
Grâce au sport, voilà aussi que les deux Corées se réunissent provisoirement sous le même drapeau, le temps d’une olympiade. Ah le sport, ah l’olympisme, flambeaux de la paix entre les nations autant qu’étendards des nationalismes. On va pouvoir gloser à qui mieux mieux sur l’esprit du sport, sur les cinq anneaux du drapeau et sur la devise des jeux : «citius, altius, fortius » que monsieur de Coubertin aurait, paraît-il, empruntée à son ami l’abbé Henri Didon qui dina, dit-on, du dos d’un dodu dindon. Voilà un monsieur qui ne perdait pas les piòts[1] ! Grâce au sport, voilà que les missiles nord-coréens sont rangés au placard, voilà que la sœur du guide suprême serre la pince aux dirigeants séouliotes, voilà que les étazuniens vont défiler en même temps que les mexicains et les ukrainiens à côté des russes. Si c’est pas beau de voir ça ! Et si cela a la couleur de la paix et le parfum de la paix, ce n’est pas vraiment la paix dans le monde car si pendant les jeux on fait semblant de s’aimer, on en reprend de plus belle les hostilités dès que tout cela est terminé. Mais ne boudons tout de même pas notre plaisir car pendant les jeux les marchands de popcorn écoulent leurs stocks jusqu’à épuisement, les vendeurs de boissons gazeuses font roter la planète sportive et les fabricants de chaussures de sport se régalent en tête de gondole. Sans compter les négociants en pantoufles et en tongs car les jeux olympiques d’hiver mobilisent plus de chaussures d’intérieur que d’équipements sportifs stricto sensu. Et il n’y a pas que ces babioles, déjà les grosses entreprises de travaux publics se sont goinfrées en bétonnant et en goudronnant les lieux sportifs coréens et leurs accès, mais de plus les télévisions du monde entier s’arrachent les droits de retransmission et les fournisseurs de produits dérivés ne savent plus où donner du logo. Je ne sais pas si c’est réellement bon pour l’économie mais cela profite sans aucun doute à certains portefeuilles bien placés. N’allons tout de même pas trop loin car on sait bien que les membres des comités, par exemple, sont de généreux bénévoles toujours prêts à donner de leur personne et de leur bourse pour la gloire du sport et rappelons ce qui est écrit :
« Le Comité International Olympique est une organisation internationale indépendante à but non lucratif, composée de volontaires, qui s’engage à bâtir un monde meilleur par le sport. Il redistribue plus de 90 % de ses revenus au mouvement sportif au sens large, soit chaque jour l’équivalent de 3,4 millions de dollars (USD) pour aider les athlètes et les organisations sportives à tous les niveaux dans le monde. »
Voilà qui est bien dit et qui cloue le bec au chroniqueur grincheux et si cela n’est pas la vérité, cela y ressemble bellement.
On voit par-là qu’il vaut mieux écouter CoolDirect sport en live, il y a Agen-Toulouse à 18 heures ce samedi.


[1] De l’occitan piòt, dindon. L’expression signifie « ne pas perdre la boule ».

jeudi 22 février 2018

René-la-Science (90)



— Je ne sais pas. Mais, de toute façon, lui en dire trop, c’est aussi lui en mettre trop sur le dos. Donc il vaut mieux y aller doucement, dis-je.
— Et Michel, tu vas le voir quand ?
— Tout de suite et avec toi si tu veux bien. Il aura la chance d’avoir devant lui le cercle de ses bienfaiteurs, dis-je.
— J’ai pris la journée, on y va. Juste le temps de prendre un autre café et un autre croissant, tu sais que les émotions ça creuse. Toi aussi un café et un croissant ?
— Oui, garçon ! La même chose s’il vous plaît.
Une fois le café bu, nous partîmes vers la clinique. Nous eûmes de la chance, Michel était seul et je demandai à l’infirmière si nous pouvions le promener un peu dans le parc. Je présentai René à Michel et nous partîmes avec lui.
Je poussai sa chaise roulante et nous avançâmes dans les allées du parc de la clinique. Il faisait très beau, l’automne venait à peine de pointer le bout du nez, quelques nuages blancs égayaient un ciel bleu limpide. Nous arrivions dans un endroit qui ressemblait presque à un petit labyrinthe, avec des haies de buis et de troènes. Un petit plan d’eau avec un jet au milieu créait une ambiance romantique. Je m’arrêtai et passai devant la chaise roulante de manière à faire face à Michel. René prit ma place aux poignées de la chaise, sans avancer.
— Ecoute-moi, Michel. Ecoute-moi si tu le peux, mais si je te parle, c’est parce que je crois que tu peux m’entendre et me comprendre. Mais en tout cas, j’ai besoin, moi, de parler devant toi et face à face. S’il y a mon pote René qui est ici avec moi, c’est parce qu’il peut tout entendre car il est au courant de tout. Absolument tout. Et de plus, il a pris une part non négligeable dans notre affaire, j’y viendrai. Par contre, Magali, son frangin, ta mère etc., personne d’autre n’est au courant.
Et je déballai toute l’histoire devant lui, le chantier au château, le retour au souterrain, la négociation et la vente. Je lui dis pour le coffre, la tutelle et mon incertitude quant à qui aura en charge le coffre. Je ne savais nullement ce qu’il avait perçu de tout ce que je lui avais dit, mais je lui trouvai une bonne gueule, j’eus l’impression d’avoir bien fait et puis cela me fit du bien à moi. Nous revînmes à la clinique et remîmes Michel aux bons soins du personnel soignant.
Nous nous arrêtâmes pour manger un morceau sur l’aire du Frontonnais. Ce n’est pas un trois étoiles, mais cela nous nourrit et de plus nous étions en bonne compagnie puisqu’avec nous-mêmes. Je ramenai René au Blédard dans l’après-midi, puis je revins chez Michel. Je ne comptais pas m’y attarder mais je voulais revoir Sylvie si cela était possible. C’est vous qui voyez…, m’avait-elle dit. Je supposai qu’elle avait entendu quelques petites choses sur mon compte et cela était peut-être intéressant à savoir. Et, quoiqu’il en soit, j’aurais du plaisir à la revoir. Même si elle semblait un peu une Marie-couche-toi-là, elle me plaisait bien comme elle était.
(à suivre...)

dimanche 18 février 2018

Chronique de Serres et d’ailleurs III (22)



Auditrices et auditeurs qui m’écoutez, bonjour. A l’époque des budgets municipaux, moult édiles fourbissent leurs armes afin de réclamer de l’argent pour leurs communes. On voit fleurir des articles dans les quotidiens, des sénateurs sortent de leur torpeur palato-luxembourgeoise pour se porter au secours de ces maires en colère ou en détresse. D’aucuns même, oublieux de leur passé, reprochent au gouvernement des méfaits dont ils ne sont eux-mêmes pas totalement innocents. Certains sont aussi du genre à manger avec les loups le matin et à pleurer avec le berger l’après-midi, laissant passer au Parlement des lois contre lesquelles, une fois de retour dans leurs circonscriptions, ils font mine de se révolter avec une fureur de bon aloi. Disons que les sénateurs sont élus par ce que l’on appelle « grands électeurs » et qu’ils ont donc besoin de soigner leur électorat.
De plus, s’il paraît que certaines communes ont du mal à boucler leur budget, il faut reconnaître qu’un bon nombre d’autres peuvent se permettre des dépenses fastueuses et des investissements inutiles ou redondants et de toute façon à fonds perdus. Bien sûr, l’argent dépensé n’est jamais perdu pour tout le monde : on nous dit bien que les investissements publics soutiennent l’emploi dans les entreprises du bâtiment et des travaux publics mais cela profite généralement aux mêmes entreprises qui vivent sous perfusion avec cet argent des collectivités publiques et leurs patrons roulent dans de grosses berlines ou de rutilants 4 x 4 flambants neufs.
Alors, qu’en penser ? Car, d’après le voisin de mon épicier, si les collectivités locales étaient des entreprises ou des commerces privés il y a longtemps qu’elles auraient déposé le bilan. Mais heureusement pour elles, elles ont des mécènes toujours prêts à les soutenir et ces bienfaisants financeurs, ce sont les contribuables. Car le contribuable est un banquier qui a toujours les moyens de couvrir les dépenses de ses élus, il le fait avec plaisir et dévouement et il est bien le premier à plaindre ses élus locaux dans la débine lorsqu’ils crient misère : un p’tit coup de CSG par ici et un p’tit coup de TVA par-là, à la vôtre et on est contents de trinquer dans tous les sens du terme.
Il est remarquable de voir que ce contribuable est aussi un électeur et qu’il s’obstine autant à payer de l’impôt qu’à élire la même classe politique élection après élection. Force est de reconnaître qu’une telle constance à enrichir des élus et leurs affidés est admirable et c’est à cela que l’on comprend que l’électeur se satisfait de regarder passivement les grandes chaînes de télévision nationale où ses élus viennent faire le spectacle. Et il ne manque pas d’acteurs sur cette scène avec plus de 36 000 maires et autant sinon plus d’élus intercommunaux, tous ces élus émargeant au généreux budget de l’Etat, retraites et médailles comprises.
Fort heureusement si ces élus sont nombreux, les électeurs-financeurs le sont plus encore, ce qui permet de continuer à les ponctionner de manière plus ou moins douloureuse. Sur ce sujet, on en est encore à l’époque des médicastres de Molière pour lesquels la saignée et la purge étaient les meilleures médications.
On voit par-là que le remède peut parfois être pire que le mal.