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dimanche 27 janvier 2013



Chronique du temps exigu (43)
Je parlais dimanche dernier de l’amiral et voilà qu’il me téléphone ce mercredi. Quoi ? Un coup de fil de cap ! Est-ce bien possible alors qu’il a en horreur ces instruments sans pitié pour nos oreilles ? Oui, je vous le dis, c’était bien lui qui m’appelait d’Honfleur où son brick « La Marrante » était à l’ancre, immobilisé et en panne de son énergie vitale.
Comme nous l’avons vu dans la 28ème chronique, cap avait découvert une énergie renouvelable et inépuisable pour mouvoir son élégant, quoique d’origine britannique, brick. Il s’agit de l’énergie scolaire, cette fameuse énergie en réserve dont l’exploitation et l’utilisation sont brevetées par cap et permet de propulser son navire à plus de dix-sept nœuds contre le courant sur la Seine. Sans voilure et donc sans mât, sans cheminée et donc sans fumée, ce vaisseau fend les eaux les plus hostiles comme les plus calmes et passe alertement sous les ponts. Comme l’aurait dit Apollinaire : «  Sous le pont Mirabeau, passe le cap ! ».
Toutefois, vous n’êtes pas sans savoir et vous resterez sans ignorer que, ce mercredi, les syndicats des enseignants ont déclenché un mouvement de grève et décidé une journée d’action. Evidemment, un mouvement qui dure toute une journée d’action, cela a provoqué une débauche inhabituelle d’énergie scolaire qui a laissé sans ressources notre amiral et sa « Marrante ». Nous étions convenus de nous retrouver sur le quai de la Ménestrandise pour quelque agape dans un bistro connu de nous seuls et voilà cap dans l’impossibilité d’honorer ses engagements. Il a donc mis à l’eau une chaloupe pour accoster au port et me téléphoner d’un petit bistro d’Honfleur où il avait notamment dégusté une part de schwarzwälderkirschtorte directement importée de Tryberg, haut lieu de la fabrication du coucou en Forêt-Noire, arrosée d’un délicieux gewurztraminer. Il avait un peu abusé de cette boisson et la conversation fut un peu longue, l’alcool rendant difficile la prononciation de ces mots germaniques au gosier francophone et irrigué de notre ami.
Remis de ses émotions, le lendemain, il fit parvenir par câble un message de solidarité au ministre de l’Education dont le ministère s’était de même retrouvé comme la bouteille, à l’encre.
On voit par là qu’une bonne action et un bon mouvement ne sont jamais perdus.

dimanche 20 janvier 2013



Chronique du temps exigu (42)
Au fil des chroniques de l’année 2012, nous avons vu apparaître certains personnages et il serait bon que nous nous les remémorions afin de ne pas les laisser tomber dans un fatal oubli.
Il y a ceux dont j’ai cité les textes afin de me donner un peu d’oxygène. D’une part Sun-Tse (16ème  chronique) et d’autre part Apollinaire (20ème chronique).
Il y a aussi François Fierobe, auteur de « la mémoire de l’orchidée » dont j’ai promis de parler ultérieurement (35ème chronique) et je n’ai pas oublié cette promesse.
Il y a bien sur aussi certains personnages qui se sont illustrés dans l’actualité. Laissons d'aucuns continuer à fouiner dans la niche des russes et d'autres retourner au néant où ils auraient mieux fait de rester.
J’ai aussi cité Gorgone, la sœur d’Emile, mais cela était (28ème chronique) pour mémoire…
Toutefois quelques personnages du plus haut intérêt continueront à passer de ci, de là, entre et dans les lignes de ces chroniques. Et tout d’abord – et non des moindres- le Commandant du Black Pearl et son adjoint (29ème chronique) : que sont-ils devenus dans le tréfonds du lac ? Ont-ils été happés par un octopus géant ainsi que l’avait été le Nautilus du Capitaine Nemo ? Et la dame du Lac ? Apprendrons-nous quelque chose à son sujet ? Vivement qu’ils nous donnent de leurs nouvelles. Et Ocellant ? Pour ce dernier, il me semble savoir qu’il suit sa quête et je pense en avoir quelques échos incessamment.
Quant à Marondeau (14ème chronique), antiquaire, scrabbleur et deus ex machina, j’espère que vous en saurez plus sur lui dès la publication de mon prochain roman « Loin de la douleur passée ».
Restent l’amiral cap (18ème et 28ème chroniques), mon ami Tellia (22ème chronique) et le bon Docteur V. Ce dernier n’a pas fini de nous surprendre avec ses médications judicieuses et nous aurons l’occasion d’en reparler, il fait en ce moment les soldes dans une usine de chaussettes. Quant à mon ami Tellia, c'est un puits de vérités premières et je me ferai l’exégète assidu des plus éblouissantes de ses sentences. Mais l’amiral, me direz-vous ? Ah, ce cher cap, si décrié pour ses excès alcoolisés ! Je m’en voudrais de le laisser tomber dans l’oubli alors qu’il déploie des trésors d’ingéniosité maritime et terrestre en vue d’améliorer les conditions de vie de ses concitoyens. Bien sur, l’abus de cap est dangereux et je ne vous relaterai ses aventures qu’avec modération, d’autant plus que ce dernier fréquente beaucoup d’étrangers ce qui n’est pas sans risque pour sa  néanmoins robuste santé mentale.
On voit par là qu’il nous reste encore beaucoup à faire en 2013.

dimanche 13 janvier 2013



Chronique du temps exigu (41)
La Russie est un grand pays qui a connu des fortunes diverses depuis cent ans et même plus. Mais en ces temps où la démographie des pays occidentaux connaît une accélération du vieillissement de la population, les dirigeants russes ont imaginé une solution que même les plus radicaux de nos politiciens n’auraient pas osé envisager.
En effet, la grande Russie se propose de nous venir en aide et de nous débarrasser de nos comédiens vieux, aveugles, riches et imbéciles. Elle a déjà sollicité notre presque belge Deparlefisc (celui dont je parlais dans la chronique du 30 décembre) pour lui offrir non seulement un passeport mais aussi un ministère. La Russie ne manque pas de ministères inutiles autant qu’inemployés et une maison de retraite pour ce genre de vieux cabotins pourrait en être largement pourvue. En outre, il y a aussi Madame Frigide Fardeau qui sollicite de pouvoir se retirer dans cette thébaïde ex-soviétique où l’on n’euthanasie pas les éléphants tuberculeux mais uniquement les journalistes, les tchétchènes, les artistes rebelles et les opposants en tous genres, de préférence en parfaite santé.
On comprend que cela ne sera pas très agréable pour les populations de ce pays de se coltiner des boulets pareils, d’autant que nous pourrions en trouver un bon nombre d’autres à leur refiler : quelques présidents en retraite anticipée, quelques chanteurs américanomorphes, quelques présentateurs de télévision et autres marchands de bésicles. En compensation, ces vieux imbéciles riches seraient autorisés à emporter leur argent sale. Car pour que l’argent soit sale, il ne suffit pas de le gagner salement ou non, encore faut-il, comme ils semblent savoir le faire, le garder salement.
On voit par là que les papys russes seront bientôt momifiés.            

jeudi 10 janvier 2013




"Où l’on reparle de Fortunio.

Nombreux sont celles et ceux qui se demandent ce que Fortunio a fait de son magot. Pour le reste, on sait très bien que René-la-Science et Magali ont raflé la mise. Mais Fortunio ? Qu’a-t-il fait de son or ? L’a-t-il planqué à Marmande, au milieu des champs de tomates et de patates ? L’a-t-il monnayé et a-t-il placé l’argent dans du défiscalisé ou du père-de-famille ? Cela n’est pas simple de garder un tas de pièces d’or par devers soi.
« Les gens qui pensent que tout est facile, ce sont toujours de vieux fossiles, ce sont des hommes de Cro-Magnon… » et Fortunio est un gros mignon ! Un joli poisson à pêcher…
Bien sûr, il a raconté l’histoire de René-la-Science, l’histoire de Michel et Magali, on ne peut pas lui reprocher d’avoir passé sous silence ce qui s’est passé par la suite. Car il s’en est passé des choses par la suite, mais avec d’autres protagonistes. C’est une autre affaire et notre Fortunio n’allait pas se vanter de ce qu’il lui est arrivé. Peut-être n’en parlera-t-il jamais. Ou peut-être arriverai-je à le faire parler, autour d’un cubi de rouge et d’un sauciflard."

Voilà ce que je vous disais le 25 juin (et non le 28) et je ne m'étais pas trompé car j'ai réussi à le faire parler, ce sacré Fortunio ! Voici le début de ce qu'il m'a raconté avec en exergue un extrait de poème :


On aimerait pouvoir effacer
Certaines scènes du passé
On aimerait pouvoir effacer
Certaines rencontres du passé
On aimerait avoir la possibilité
De pouvoir tout recommencer
Comme un livre mauvais                                                                                                                       Qu’on aimerait fermer à jamais
 
(avec l’aimable autorisation de Corinne MOLINA)
Le magot de Fortunio
Il y a des jours où l’on voudrait n’être pas né. Des jours où l’on voudrait pouvoir tout effacer et tout recommencer, comme sur un tableau noir. Ou bien dire pouce, je redouble la classe.
Mais dans la vie, on n’est plus à l’école. Plus de maître à qui on pourrait dire la prochaine fois je le ferai plus, la prochaine fois je ferai mieux. Dans la vie, quand on a fait une connerie, on paye comptant. Et on paye d’autant plus cher qu’on est de bonne foi, qu’on a cru bien faire, qu’on n’a pas voulu s’en mettre plein les poches.
Moi, je n’ai pas truandé, j’ai juste voulu défendre la presque veuve sans orphelin. La prochaine fois, j’y regarderai à deux fois avant de jouer le chevalier blanc.

A trente-cinq ans, j’ai (j’avais ?) un boulot dur mais qui marche bien. J’ai (ou avais-je ?) une petite entreprise de maçonnerie en pleine croissance.
J’ai investi dans du bon matériel, ma clientèle est en expansion, mon carnet de commandes est plein.
J’ai embauché deux ouvriers, pas des glaires, non, des gars qui veulent et qui savent travailler. J’ai pris un apprenti, on sait ce que valent les apprentis mais avec deux gars comme les miens, ce jeune est bien obligé de suivre.
J’ai une maison que je retape pendant les périodes creuses, j’ai abandonné mon projet de maison neuve, on verra plus tard. J’aime bien cette vieille maison, pourquoi en vouloir une neuve ?

Pas un centime de dettes avec tout cela, rien que du cash. Et de la trésorerie en banque.

Tout cela grâce à mon magot. Oui, mes pièces d’or, je ne sais pas si vous le savez mais j’avais ramassé un joli petit pécule en napoléons, des vingt francs-ors. Je raconterai un jour cette histoire dans un bouquin mais qui s’en souviendra ?

Toujours est-il que ce magot m’a porté chance. Je n’ai vendu aucune de mes pièces, je suis toujours assis sur mon tas d’or, comme un avare. Mon or, c’est mon talisman. Je sais qu’il est là, il me protège et me donne la force et le courage d’aller de l’avant, de foncer. Mon or, c’est mon parachute doré, mon terrain d’atterrissage et ma garantie. Je suis le seul, ou presque, à savoir qu’il existe et certainement le seul à savoir où je l’ai planqué.

Un magot comme cela, on ne le laisse pas à l’air libre, il ne lui faut pas trop d’oxygène et pas de regards concupiscents non plus. Il faut qu’il brille dans le noir. Ne comptez pas sur moi pour vous donner le moindre indice.

Et alors, de quoi je me plains ? J’ai du boulot, la santé, la maison et le fric. Et pourtant, je voudrais reprendre à zéro. En fait non, pas tout reprendre à zéro, juste revenir un peu en arrière, avant que je ne la rencontre.

Oui, si je me plains, c’est parce que je me suis mis dans la mouise, ou même carrément dans la merde, devrais-je dire. Il vous est déjà arrivé d’aller en taule ? A moi, cela ne m’était jamais arrivé, je ne savais pas ce que c’était et je n’en avais aucune idée. Maintenant, j’y suis. Et sans savoir quand j’en sortirai. En préventive, l’instruction suit son cours. Et le cours d’une instruction, ça dépasse rarement le mur du son. Personne ne vous dit rien et vous pourrissez dans une cellule sans savoir si les jours passent et si qui que ce soit pense à vous hors les hauts murs de la prison.

Comment fait-on pour en arriver là ?
Cherchez bien, que manque-t-il dans ce tableau merveilleux que je vous ai dépeint ? Si je suis dans le pétrin, aucune hésitation, cherchez la femme dit l’adage policier. Oui, parce que dans toute cette histoire : pognon, maison, santé, magot, tout y est mais pas de femme ! Et c’est quand Angelina est arrivée que cela a mal tourné.

Angelina, Angie pour les intimes, avec un nom pareil on n’est pas loin du paradis… mais du Capitole à la roche Tarpéienne et du paradis à l’enfer…faute de pouvoir rembobiner une partie de ma vie, je vais quand  même vous raconter comment c’est arrivé.

 (à suivre...)