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dimanche 30 août 2020

Chronique de l’été 2020 (9)

Aimables lectrices, aimables lecteurs, bonjour. Voici la dernière chronique de l’été et j’en profite pour vous raconter une histoire qui s’est passée dans les années 50 aux USA et qui fut relatée par un professeur de psychologie sociale, Léon Festinger.

Dans le courant de l’année 1954, un journal local de Chicago annonçait qu’une habitante de la ville avait reçu des messages des extraterrestres de la planète Clarion. Ces messages annonçaient que le monde allait être englouti par une vaste inondation avant l’aube du 21 décembre 54. Un groupe de croyants, menés par cette dame, s’était fortement impliqué dans cette affaire et attendait la soucoupe volante qui permettrait leur salut. Ces croyants avaient une telle conviction qu’ils avaient tout abandonné, emplois, études, conjoints, argent et biens dans la perspective de cette fin du monde.

Festinger et ses collègues ont réussi à infiltrer le groupe peu avant le 20 décembre et ils ont pu ainsi relater la chronologie des évènements et l’évolution des mentalités. Le 20 décembre au soir, tous les croyants sont rassemblés chez cette dame et attendent l’arrivée du vaisseau spatial qui les sauvera du cataclysme annoncé. La prophétie avait été communiquée par les extraterrestres par écriture automatique, à savoir qu’ils transmettaient à la dame qui écrivait machinalement sous leur dictée.

Peu avant minuit, tous les fidèles sont rassemblés, ils se sont débarrassés de tous objets métalliques pour ne pas perturber leur embarquement et ils attendent. A minuit cinq, toujours rien. Mais un fidèle annonce que la pendule est probablement en avance de dix minutes et que l’heure va arriver. Minuit dix, toujours rien et les fidèles sont totalement abasourdis tellement leur croyance en cette fin du monde était intense.

Quatre heures du matin, dans un pesant silence, la dame de Chicago se met à pleurer car toutes les tentatives pour expliquer ce que j’appellerais l’absence de la fin du monde furent vaines, nul ne peut trouver les raisons de cet échec.

Quatre heures quarante-cinq minutes, la dame est pressentie pour un nouveau message dans cette écriture automatique. Il est annoncé que la planète Terre sera épargnée et sera sauvée de la destruction par le dieu. Le cataclysme n’a pas eu lieu car le groupe, assis toute la nuit avait, dans sa ferveur, répandu tant de lumière que le dieu a sauvé le monde de la destruction.

Le lendemain dans l’après-midi, le groupe appelle les journaux et propose moult entretiens pour faire connaître à un public le plus large possible l’ampleur de ce qui avait été évité.

Léon Festinger a publié un livre à ce sujet en 1956 dont le début du titre est : « When prophecy falls », ce que je vous traduis par « Quand une prophétie se casse la pipe ». Cette histoire, entre autres, lui a permis d’élaborer une théorie dite de la dissonance cognitive. Cette étude et ce concept sont restés célèbres et font toujours partie des grandes notions de la psychologie sociale.

Alors, pour conclure, je dirais que toute ressemblance entre cette histoire et celle, très actuelle, des mesures visant à nous protéger d’une épidémie serait purement fortuite. Même si on se doute que, si l’épouvantable pandémie venait à ne pas s’étendre, les fidèles hippothéocratiques arriveraient à nous dire que c’est grâce à leurs prières, leurs masques et bergamasques, leurs mesures de distanciation à géométrie variable et autres mesures incantatoires que l’humanité a été sauvée du plus grand péril possible… après les autres épidémies, la faim dans le monde et les guerres.

On voit par-là qu’il ne faut pas se hâter de conclure trop rapidement.

 

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jeudi 27 août 2020

Appelez-moi Fortunio (81)


-          Le cabinet de curiosités ? Oui, c’est surprenant et même carrément effrayant pour certaines choses…
-          Donc vous avez vu ce qu’il y a dans le petit placard ?
-          Epouvantable ! Qu’est-ce que ça peut être ?
-          Monsieur Sylvère me l’a montré, peu de temps avant que je quitte le château. C’est un masque africain qui a été volé en Centrafrique, je ne sais pas exactement où, mais c’était un masque de sorcier, considéré comme très précieux car il a été réalisé, parait-il, avec un authentique crâne humain. Il aurait servi comme d’une sorte de remède par les frayeurs qu’il provoquait à qui le voyait. Mais je vous avouerai que je ne m’en suis pour ainsi dire jamais remis, de l’avoir vu.
-          Je vous comprends…
-          Je ne comprends pas que Rambaud ait osé garder cela, je n’ai pas osé lui poser la question. Pour moi, cela devrait être confié à des spécialistes qui essayeraient d’en retrouver l’origine et qui le restitueraient à qui de droit. Et si ce n’est pas possible, le mettre en collection dans quelque musée mais pas chez un privé. Ce pauvre Daniel fera bien de s’en séparer.
-          Mais, vous qui vous intéressez à l’histoire, vous pourriez peut-être l’aider ?
-          S’il est un peu plus ouvert que son père adoptif, pourquoi pas. Je ne suis ni un historien ni un archéologue mais je connais des gens compétents à Montauban ou à Toulouse.
-          Je peux lui en parler ?
-          Je veux bien, je suis d’accord pour le rencontrer. Mais, croyez-moi, je pense qu’il ferait mieux de ne pas habiter le château. Qu’il vende et aille s’installer ailleurs, il sera bien plus tranquille…
-          Vous avez certainement raison, répond distraitement Albert qui a constaté que la charmante Rosa n’arrête pas de le regarder d’un œil coquin. Il se sent rougir un peu puis, pour se donner une contenance, il reprend la conversation :
-          Donc, vous m’avez parlé de la tour et de son ombre, du souterrain, du masque mais vous avez à peine parlé de ce monsieur Sammy, le magicien…
-          Je ne pourrais pas en dire grand-chose, ce que je connais le mieux, c’est le cabinet de curiosités –et encore, je n’y allais qu’avec monsieur Sylvère quand le patron était absent. Car Monsieur Sylvère avait la clef et il m’a montré une sorte de lanterne magique…
-          La lanterne du château des Carpathes !
-          Je vois que vous connaissez aussi. Puis des objets bizarres en tous genres dont certains doivent être manipulés avec précaution car si on les sort de leur boite, on n’arrivera plus jamais à les y remettre, par exemple des billes qu’on ne peut plus arrêter quand on les a mis en route…
-          Vous avez essayé ?
-          Non, bien sûr, mais si monsieur Sylvère me l’a dit… enfin vous n’êtes pas tenu d’y croire mais vous ne direz pas que je ne vous l’ai pas dit ! Mais je vous le dis et vous pouvez me croire, cette maison est dangereuse pour qui ne saurait y faire. Voyez : monsieur Sylvère dont vous me dites qu’il s’est suicidé…
-          Ou qu’on l’aurait suicidé !
-          Monsieur et madame, un étrange accident de voiture. Le vieux Rambaud qui crève dans sa misère morale…
-          Et c’est bien le seul qui mourra sur place !
-          Ouais mais peut-être de la pire des morts, abandonné de tous y compris de lui-même. Mais quoi ! Aller habiter cette maison en gardant tout en place, les meubles, les objets, tout, tout, tout… Sans compter l’épisode des miliciens, les tortures dans la cave, les exécutions et ça se termine en champ de bataille avec les maquisards. Je vais vous dire : cette maison est damnée et Daniel n’y fera pas de vieux os. Ou il repartira à l’asile !
-          J’ai entendu le message et je saurai le faire passer. Mais une question encore : et madame, vous ne m’en avez guère parlé, pourquoi ?
(à suivre...)

dimanche 23 août 2020

Chronique de l’été 2020 (8)

Aimables lectrices, aimables lecteurs, bonjour. L’été avance et la fin du mois d’août approche à grandes dates. Alors, je vous annonce tout de suite un changement pour la saison radiophonique et chroniqueuse prochaine : le titre va changer et, de même que ce dernier, la teneur changera aussi. Cette chronique s’appellera désormais, jusqu’à nouvel ordre et jusqu’au prochain désordre «  Contes et histoires de Pépé J ». En effet, j’essayerai de ne plus commenter l’actualité, quelle qu’elle soit, ni la sottise de nos concitoyens, si importante qu’elle puisse devenir. Non qu’il manque de matériaux mais je craindrais, d’une part, de devenir un vieux grognon rouspétant à tort et à travers et, d’autre part force est de constater que nous nous approchons d’une société de type autoritaire –sinon totalitaire- prête à lancer les foudres de la censure et des tribunaux sur les commentateurs de toutes sortes.

En effet, je perçois dans les médias une recrudescence des inquisitions, qu’elles soient religieuses ou morales, féministes ou décolonialistes, complotistes ou anticomplotistes, sanitaires et sociétales. Donc je préfère me retirer sur un terrain d’histoires et de contes où j’essayerai de laisser libre cours aux péripéties d’antan, aux légendes et aux contes imaginaires ou non. Je continuerai aussi à rechercher les pépites littéraires que recèle le sud-ouest, je vous en ai déjà réservé l’une ou l’autre. Bien sûr, nombre de mes amis, personnages au long cours sillonnant les vagues de mes chroniques sont capables de resurgir sans vergogne, ainsi qu’ils étaient accoutumés de le faire.

C’est ainsi que l’on déboulonne sa propre statue, bien que je ne possède encore que les boulons, pour le monument on verra bien plus tard. Et, en guise de dessert, je vous sers un poème de ma fabrication et de circonstance.

Eté

Les prés ont soif l’été, brulés par le soleil

Ils font un tapis brun parcouru par la vache

Qui lovant sa langue avec patience arrache

Quelque maigre regain plongé dans le sommeil.

 

Ça pointe une luzerne et là pousse un bleuet

Ici une fleur jaune au bord d’une crevasse

Les tourbillons lèvent la poussière et la crasse

La cigale stridule un ardent menuet

 

O que se calme l’août, le cagnard et l’autan

Revienne la rosée, la pluie et le gros temps

Reverdira le sol soulagé sous l’ondée

 

L’automne reviendra éteignant le brasier.

Les cieux cléments verront la terre fécondée

Vaches et veaux enfin vont se rassasier.

 

 

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