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dimanche 29 mai 2016

Chroniques de Serres et d’ailleurs. (36)



De notoriété publique, le mois de mai est riche en jours fériés. L’année en cours nous permet de le vérifier. L’inamovible premier mai, fête du travail, et son fidèle 8 mai, jour de la victoire figurent chaque fois à son palmarès mais tombent cette année assez pernicieusement un dimanche. Toutefois, par la grâce du comput –lui-même dépendant de l’Épacte, de la lettre dominicale, du cycle solaire, du nombre d’or et de l’Indiction romaine – nous comptons cette année l’Ascension et la Pentecôte en mai ! Au détriment du mois de juin qui se voit privé de son unique possibilité de jour férié… Nous avons déjà vu mars s’emparer du vendredi-saint (outre-Vosges) ainsi que du lundi de Pâques. Mais force est de reconnaître que certains mois manquent cruellement de jours fériés chômés. Février tire son épingle du jeu en étant plus court que les autres mais septembre et octobre se refusent année après année à nous offrir des jours de congé.
Janvier, avec son premier jour, répond toujours présent ; juillet, avec ses fêtes nationales aussi ; novembre n’est pas en reste et décembre fête avec régularité la naissance de Jésus de Nazareth. Quant à août, il a le bon goût de posséder un jour férié pendant les vacances de bon nombre de salariés. Je dis le bon goût car certains d’entre eux seraient bien en peine de nous expliquer ce que signifie la fête du 15 août, assomption de la Vierge Marie. Moi-même, pour tout dire…
Mais où irions-nous si chaque salarié qui bénéficie d’un jour chômé payé devait en outre connaître la raison pour laquelle ce jour est non seulement fêté, mais encore férié, chômé et payé (pour ceux qui le sont). Pour le premier de l’an, pas dur : c’est le premier jour d’une année qui promet d’être longue. Pour Pâques, pas de problème non plus puisqu’on le fête un lundi ! Et de même pour la Pentecôte…Quant au premier mai, nul n’ignore ce qu’est le travail, d’aucuns pour en être des adeptes et d’autres pour le fuir avec constance. Les fêtes nationales sont tout de même bien identifiées de tous mais il faut reconnaître que ce sont ceux qui prônent avec le plus de vigueur les valeurs républicaines qui les méconnaissent le mieux. Et si d’aucuns ignorent qui était ce petit jésus qui naquit, paraît-il, un 25 décembre, tous savent qui est le père Noël, ce financier qui fait vivre tant de commerçants.
Restent toutefois deux fêtes, le huit mai et le onze novembre dont moult bénéficiaires ne savent pas si elles commémorent le début de la guerre ou la fin de la paix ou réciproquement. C’est bien pour cela que la paix n’arrête pas de se faire attendre et que la guerre n’en finit pas de durer. Commémorerait-on la fin de la guerre de cent-ans ou le début de la guerre des boutons que ces salariés insoucieux de leur devoir de mémoire s’en ficheraient comme d’une guigne.
On voit par-là que la paix comme la guerre deviendront bientôt obsolètes.

jeudi 26 mai 2016

Le cabot de Fortunio (99)



-          Ouais, enfin passons. Donc au total le chef dans le coma, pronostic hyper réservé ; deux acolytes envoyés ad patres. La rançon dans la nature. Mais ce n’est pas tout. L’avocat qui avait contacté CL pour la rançon a été retrouvé flingué dans son appartement à Paris. Ça s’est passé en plein après-midi, la secrétaire s’était absentée pour aller à la poste et elle l’a trouvé au retour. Ça ne peut donc pas être Edkès ou ses complices mais il reste deux gonzes dans cette affaire : celui qui a contacté l’avocat et le cinquième homme de la bande qui était au Gondo. Je dis le cinquième puisqu’il en est resté un dans le désert. Le gus qui a contacté l’avocat est le principal suspect puisque l’avocat l’a sans doute rencontré et connait donc son visage. L’autre gus, ils ne savent pas de qui il s’agit. Voilà, je crois avoir dit tout ce que le frangin m’a raconté. Evidemment, sous le sceau du secret…
-          Je comprends. Et ils ont des pistes ?
-          Ah oui, c’est vrai. Le gars qui a tué l’avocat aurait été filmé par une caméra de surveillance. Et ils sont en train de passer l’appartement et le bureau au peigne fin, histoire de trouver des empreintes ou de l’ADN. Je te tiendrai au courant. De toute façon, la maison d’Arcueil est encore sous surveillance au cas où un des deux se pointe. De même que les portables.
Je me prends à penser à Willy. Ce pauvre couillon risque fort de se faire choper s’il retourne là-bas. Mais bon, il avait qu’à pas jouer les chauffeurs zélés.
Une fois qu’il a terminé son rapport, Raymond se lance dans l’histoire des clébards. A franchement parler, cela commence à me gonfler mais je dois quand même ménager mon interlocutinformateur. Je prends mon mal en patience et je suis sauvé par le téléphone. C’est François. Avec des nouvelles commack ! A savoir qu’Eliane va être transférée incessamment sous peu dans un centre de repos et de rééducation en région toulousaine. Voilà qui me fait bondir le cœur. A part ça, il me distille lui aussi des infos, presque pareilles à celles de Raymond en plus diplomatiques, le Quai, c’est le Quai ! Et, selon ce dernier, la rançon est perdue définitivement. On va tout de même pas s’emmerder pour une telle broutille, à peine de quoi payer un mois de petits fours dans une ambassade quoi ! Donc, de ce côté-là, c’est du tout bon pour nous, pensé-je en mon for intérieur. Reste à attendre le retour d’Eliane.
*
(à suivre...)

dimanche 22 mai 2016

Chroniques de Serres et d’ailleurs. (35)



Auditrices et auditeurs qui m’écoutez, bonjour. Lundi de Pentecôte, journée de solidarité voulue en 2004 par le gouvernement Raffarin. Ce jour férié non payé sert à financer la solidarité avec les personnes âgées. Sans se lancer dans des considérations sur l’utilisation de cet argent, rappelons que ce n’est pas de l’argent gagné mais de l’argent économisé. L’argent économisé, comme l’expriment le bon sens autant que les données immédiates de la conscience collective, c’est l’argent que l’on n’a pas dépensé augmenté de l’argent que l’on aurait pu gagner. Economiquement, c’est très habile. En 2006, le premier ministre Villepin a pu dire que les bénéfices tirés de cette journée « n’étaient pas calculables ». Nous parlerons donc de bénéfices incalculables et ce n’est pas rien.
Revenons à notre journée de solidarité. Une année entière ne suffit plus à contenir toutes les journées dédiées spécialement à ceci ou cela. Les saints du calendrier se bousculaient déjà depuis belle lurette. Voilà que, particulièrement sous la pression de certains lobbies, le calendrier est encore mis à mal par de nouvelles présences qui font des jaloux. Il y a peu, une journée avait été dédiée à la commémoration de la Résistance. Aussitôt, un lobby d’électroniciens fougueux a exigé une journée pour les condensateurs à laquelle seraient associés les semi-conducteurs. Entendant cette demande, les apprentis conducteurs en conduite accompagnée n’ont pas voulu être en reste par rapport aux semi-conducteurs. On voit par-là que les années deviennent bien courtes.
Et enfin, revenons à l’idée de commémoration. Le devoir de mémoire, de nos jours, a évincé le droit à l’oubli et l’on commémore tant que l’on peut. Mais ne peut-on commémorer que le passé ? La journée de la femme, judicieusement placée le 8 mars, permet de penser que non. En effet, si on se place au point de vue du chroniqueur Alexandre Vialatte, la femme, remontant à la plus haute antiquité, peut être commémorée. Mais, selon la vision du poète Aragon, la femme est l’avenir de l’homme et la journée du huit mars peut aussi être considérée comme la commémoration de cet avenir.
On voit par-là que l’avenir est à la commémoration du futur. Qui mieux qu’un poète communiste pouvait nous le faire comprendre ?