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dimanche 29 juin 2014

Chronique du temps exigu (112)

Et si la chronique d’aujourd’hui n’était pas une chronique mais seulement un texte d’autopromotion, une publicité à peine déguisée pour la suite des opérations ?
Eh bien oui, car je rappelle que jeudi le soixante neuvième et ultime épisode du « Magot de Fortunio » vous sera livré en toute sérénité. Et cela durait depuis le 10 janvier 2013, date à laquelle j’ai démarré avec trois épisodes en poche. Au cours de l’année qui a suivi, j’ai été talonné semaine après semaine par ce sacré Magot. Chaque mercredi soir, vous l’avez bien compris, je prenais mon téléphone pour arracher à Fortunio l’histoire que j’ai racontée sur ce blog et chaque bribe a donné lieu à un épisode. Bon, je dois avouer que fin 2013, j’ai pris mon bâton de pèlerin, mon cubi de rouge et mon sauciflard et je suis allé secouer Fortunio, Albert Forelle, dans son antre marmandais et je lui ai soutiré la fin de l’histoire, sinon plus…
« Le magot de Fortunio » paraîtra d’ici la fin de l’année mais je signale tout de suite que les premiers épisodes ont mystérieusement disparu du blog, ce piratage est certainement dû au fait que les révélations fracassantes de ce roman dérangeaient en haut lieu. Alors, il ne restera plus qu’à acquérir la version papier pour retrouver l’intégralité de cette passionnante aventure.
Mais que veut donc dire ce « sinon plus… » ? Tout simplement que, le vin aidant, Fortunio a lâché quelques indices qui m’ont fait comprendre que son histoire ne s’arrêtait pas là. Il était trop tard, je n’allais pas lâcher le morceau et il a bien dû me promettre de continuer ses stupéfiantes confidences. Et c’est comme cela qu’à partir du jeudi 10 juillet vous pourrez lire… je ne dirai pas le titre tout de suite mais je vais citer  les premières phrases prononcées par Fortunio :
« Il y a des jours où on ferait mieux de rester au lit. Des jours où la poisse vous tombe dessus sans crier gare. Comme qui dirait : « si j’aurais su, j’aurais pas v’nu ! »
Avant de vous parler du jour en question, il faut que je vous raconte ce qui s’est passé la veille puisque ce jour-là, c’était le lendemain de la veille. Aujourd’hui, on est vendredi donc hier, comme qui pourrait dire, on était jeudi. »
Donc, vous avez déjà compris que ce roman aura pour titre « Le cabot de Fortunio ».

On voit par là qu’il faut que tout change pour que rien ne change.

dimanche 22 juin 2014

Chronique du temps exigu (111)

L’été arrive et le soleil s’en donne à cœur joie. Les plans canicule sortent des tiroirs et des placards, les personnes âgées sont tenues de boire tant et plus, les marchands de casquettes et de sandalettes, de chemises hawaïennes et de boissons acidulées se frottent les mains. Les députés vont faire passer une ou l’autre mesure peu populaire pendant la trêve estivale et l’on arrose à tout va les pelouses et les bacs à fleurs qui font l’orgueil de nos élus, au diable le développement durable, on en reparlera cet hiver.
D’ailleurs, qu’est-ce donc que le développement durable ? D’un point de vue strictement comptable, on peut imaginer la possibilité d’une croissance mondiale continue et exponentielle. Mais d’un point de vue plus large et en considérant notre environnement comme limité à notre planète, cette expression est bien un de ces oxymorons dont raffolent les politiciens en manque de concepts sans significations. Il faut donc comprendre qu’il s’agit seulement d’un développement qui dure le temps d’un mandat électif. Tel affabulateur politique qui hier parlait de croissance, d’industrialisation et d’exploitation des ressources naturelles, aujourd’hui se parfume de développement durable. Cela ne veut rien dire mais cela plaît à l’électeur gogo dont la crédulité justifie les stupidités que débitent  ces élus.
Evidemment, la critique est aisée et l’art, seul, est difficile ! L’art politique plus que tout autre, surtout lorsqu’il est considéré comme une performance éphémère seulement destinée à engraisser les uns et à dégraisser les autres. Exercice d’équilibriste autant que championnat du monde de force d’inertie car l’inertie est bien le moteur principal de la politique. Il faut d’abord éviter de trop promettre, ce qui n’est pas simple, ensuite - et surtout – de trop tenir. De plus, il faut bien reconnaître que l’on a souvent évité le pire car si tous les élus devaient tenir leurs promesses nous serions rapidement dans la mouise complète et ce serait une catastrophe si, de surcroît, ils se mettaient à tenir les promesses de leurs adversaires inélus ! Que l’on me pardonne ce nez au logisme mais la litote leur va si bien…

On voit par là qu’on ne peut pas être et avoir l’été.

dimanche 15 juin 2014

Chronique du temps exigu (110)


« Rien ne sert de courir, je veux mon steak à point ! »
Vous avez immédiatement deviné que cette saillie n’est pas du tout de mon cru mais de mon ami cap, gourmet émérite mais point exclusivement cannibale car il agrémente toujours son bœuf de larges portions de frites, elles-mêmes nappées de sauce tartare. Et il a l’habitude de rajouter que le problème n’est pas d’avaler une entrecôte d’une livre et demie mais que c’est ce qu’il faut boire de Madiran pour la faire passer. Vous aurez compris que cap est un bon vivant. Et si je vous en parle aujourd’hui, c’est qu’il est venu me trouver en vue de me supplier de ne rien dire au sujet de la coupe du monde de la Fifa qui se tient en ce moment au Brésil. Et de ne pas me gausser des supporters en claquettes vautrés devant leurs écrans, de ne pas pourfendre ceux qui se gavent d’oseille en usant et abusant de la docilité et de la stupidité des sportifs en chambre et surtout de taire tout ce que je pourrais penser des méthodes brésiliennes, russes ou chinoises pour satisfaire la mégalomanie de quelques dirigeants.
Il ne sera donc aucunement question de sport mais seulement de végétarisme dans cette chronique. Car en effet, si mon ami cap est capable d’engloutir à lui tout seul une pièce de bœuf grande comme la main d’un mégalochire quand il est à terre, il est strictement végétarien lors de ses voyages en bateau. Au point même de ne pas se nourrir de poisson qu’il pêche néanmoins en abondance mais qu’il fume ou met en boîte sur son esquif. Mais pas au point de se priver d’œufs car il a un élevage de gallinacés sur son navire, soigneusement installé dans un coin, ce qui lui permet d’obtenir des œufs de forme tronconique et aurait certainement plu au grand Christophe Colomb à l’époque où il découvrit le nouveau continent.

On voit par là qu’à ce propos, j’aurais pu être tenté de parler du Brésil.

dimanche 8 juin 2014

Chronique du temps exigu (109)


Les années passant, l’on commémore à tour de bras et les dirigeants de la planète se congratulent à qui mieux mieux. Caviar et foie gras pour les uns, saucisses grillées et frites pour les autres, les larmes coulent et les discours pleuvent. Voilà au moins qui fait consensus ; et honte à qui semblerait indifférent. Ah, il en faut du courage pour commémorer et il en faut de la vertu pour discourir. Des présidents en exercice, des présidents au rancart, des reines, des hauts fonctionnaires et autres célébrités se pressent au portillon. Mais il faut reconnaître que les plages sont plus calmes, moins périlleuses en tout cas, soixante-dix années après le débarquement…
Fort heureusement, on a bien l’impression que de nos jours il ne se passe rien de mémorable et encore moins de commémorable car, comme j’ai eu l’occasion déjà de le signaler, les années sont bien courtes et peinent à contenir tout le fatras des célébrations, fêtes et jours fériés en tous genres. On en est à se demander si l’on ne pourrait créer une journée vide de mémoire, de réminiscences, de souvenirs et de souvenances. Une journée où il ne se passerait rien et dont nul ne se souviendrait. Une journée sans saint à fêter et où l’on ne travaillerait ni ne se reposerait. On gambaderait insoucieusement, sans penser ni à la veille ni au lendemain et en croquant une carotte on s’écrierait : « Quoi d’neuf, docteur ? ».[1]
Ah ! Une journée sans déclamations, une journée sans grandeur d’âme, une journée avec juste du soleil et des papillons, de la pluie et des escargots, ou du vent, des feuilles et des oiseaux. Une journée mémorable quoique aussitôt oubliée en attendant la prochaine, une journée de calme, de tranquillité, d’équanimité.
On voit par là que les jours se suivent et ne se rassemblent pas.



[1] En français : « what’s up, doc ? ».

dimanche 1 juin 2014

Chronique du temps exigu (108)


De tous les peuples de l’Europe, les Belges sont les moins étrangers, comme l’a très justement écrit Jules César. Et en effet, la Belgique n’est pas seulement polyglotte et multilingue mais ses langues nationales sont pour ainsi dire les mêmes que celles de ses pays circonvoisins. Ce qui permet à ses ressortissants de se glisser subrepticement chez nous, par exemple, sans que l’on s’en aperçoive. Donc, ce pays est divisé en trois parties : la Flandre qui est la région néerlandophone, la Wallonie région francophone avec une minorité germanophone et la région de Bruxelles-Capitale. La Flandre est majoritairement peuplée de Flamands, la Wallonie en principe peuplée de Wallons et les habitants de Bruxelles Capitale sont appelés assez logiquement Bruxello-Capitalistes, une ethnie minoritaire et irrédentiste répondant toutefois au gentilé Bruxellois[1].
La Belgique est un pays fort prisé des commentateurs sportifs français qui parlent de nos amis d’outre-Quiévrain. Il est vrai que ses nationaux cyclistes, footballistiques et brassicoles se distinguent en moult occasions. En outre, c’est un pays qui a su résorber son chômage de manière astucieuse en créant un nombre de gouvernements, de ministères et d’élus de toutes sortes proprement hors du commun : chaque région a son gouvernement et les trois régions sont elles-mêmes chapeautées par un gouvernement central. Sans compter un roi pour couronner le tout ! Cela est admirable, d’autant que tous ces emplois sont très correctement rémunérés. Nous devrions en prendre de la graine car la France est certainement sous dotée en emplois de cette sorte alors que tant de personnes y cherchent un emploi.
La Belgique me fait penser à ces plaques de marbre dont on a toujours le sentiment que, traversées de veines de couleurs si diverses, elles pourraient se rompre à tout moment. Mais il n’en est rien et le bloc marbré défie le temps comme les vicissitudes.
Le symbole le plus évident de cette pérennité est bien ce petit personnage qui, à l’angle de la rue du Chêne et après des siècles d’incontinence, continue d’abreuver le touriste enthousiaste de son énurésie généreuse. N’est-il pas étonnant de voir un si petit monument attirer presque autant de visiteurs que la tour Eiffel et le Parthénon[2] ? Quelle rigoureuse économie de moyens, sans oublier que le liquide déversé est recyclable sinon buvable. Et le geste auguste du petit homme ne nécessite nulle traduction, aucune explication, il est simple et explicite, que ce soit en chinois, en finnois ou en urinois.
On voit par là qu’il est bon d’être aussi judicieux que subreptice.




[1] En flamand :kiekefretter.
[2] Presque autant d’après la police, notablement plus d’après les syndicats.