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dimanche 29 mai 2022

Contes et histoires de Pépé J II (36) Chronique des 10 ans


 

Oreilles attentives de Guyenne et Gascogne, bonjour. Il y a dix ans, le lundi de Pentecôte tombait un 29 mai et j’écrivis, à cette occasion, une chronique à ce sujet et je l’intitulai « chronique du temps exigu ». Je n’imaginais pas que, pendant dix longues années, j’allais chroniquer hebdomadairement et inlassablement. D’abord sur ce blog que je venais de créer et ensuite conjointement sur ce blog et sur la radio CoolDirect. Je vous citerai donc cette première chronique, en hommage à l’esprit primesautier qui fut le mien.

Chronique du temps exigu


Lundi de Pentecôte, journée de solidarité voulue en 2004 par le gouvernement Raffarin. Ce jour férié non payé sert à financer la solidarité avec les personnes âgées. Sans se lancer dans des considérations sur l’utilisation de cet argent, rappelons que ce n’est pas de l’argent gagné mais de l’argent économisé. L’argent économisé, comme l’expriment le bon sens autant que les données immédiates de la conscience collective, c’est l’argent que l’on n’a pas dépensé augmenté de l’argent que l’on aurait pu gagner. Économiquement, c’est très habile. En 2006, le premier ministre Villepin a pu dire que les bénéfices tirés de cette journée « n’étaient pas calculables ». Nous parlerons donc de bénéfices incalculables et ce n’est pas rien.

Revenons à notre journée de solidarité. Une année entière ne suffit plus à contenir toutes les journées dédiées spécialement à ceci ou cela. Les saints du calendrier se bousculaient déjà depuis belle lurette. Voilà que, particulièrement sous la pression de certains lobbies, le calendrier est encore mis à mal par de nouvelles présences qui font des jaloux. Il y a peu, une journée avait été dédiée à la commémoration de la Résistance. Aussitôt, un lobby d’électroniciens fougueux a exigé une journée pour les condensateurs à laquelle seraient associés les semi-conducteurs. Entendant cette demande, les apprentis conducteurs en conduite accompagnée n’ont pas voulu être en reste par rapport aux semi-conducteurs. On voit par là que les années deviennent bien courtes.

Et enfin, revenons à l’idée de commémoration. Le devoir de mémoire, de nos jours, a évincé le droit à l’oubli et l’on commémore tant que l’on peut. Mais ne peut-on commémorer que le passé ? La journée de la femme, judicieusement placée le 8 mars, permet de penser que non. En effet, si on se place au point de vue du chroniqueur Alexandre Vialatte, la femme, remontant à la plus haute antiquité, peut être commémorée. Mais, selon la vision du poète Aragon, la femme est l’avenir de l’homme et la journée du huit mars peut aussi être considérée comme la commémoration de cet avenir.

On voit par là que l’avenir est à la commémoration du futur. Qui mieux qu’un poète communiste pouvait nous le faire comprendre ?




jeudi 26 mai 2022

Dernier tableau (78)

 

Une année, ils n’ont pas pu payer, ils ont fait traîner tant qu’ils ont pu. Si bien qu’à la Saint-Michel suivante, ils devaient presque deux années et qu’ils ne pouvaient toujours pas payer. Le propriétaire, c’était un monsieur important, il ne venait jamais au Bussiau. Il avait un homme de confiance, un ancien militaire en retraite qui avait une petite propriété du côté de La Brémarde.

– Le propriétaire, c’était monsieur de Vermorec ?

– Oui, monsieur le baron qu’ils disaient. L’homme de confiance a fini par dire qu’il allait nous expulser, que cela ne pouvait plus durer. Les Veudenne ont supplié, le militaire retraité s’est laissé fléchir, il a dit qu’il allait en parler avec monsieur le baron. On les a vus revenir tous les deux quelques jours plus tard. Ce jour-là, le vieux n’était pas là, il n’y avait que moi et la mère Veudenne. Elle m’a envoyé sortir le fumier des cochons et je ne sais pas ce qu’il s’est dit entre eux. Mais j’ai entendu les vieux en parler après. Elle a dit que monsieur le baron prenait l’affaire en main et qu’il dispensait son homme de confiance de s’en occuper. Monsieur reviendrait dans quelques jours pour en parler et pour trouver un arrangement. La vieille a carrément dit à Veudenne que le baron lui avait fait les yeux doux et elle a suggéré que Veudenne la laisse mener les choses à sa guise, elle voulait voir le baron seule à seul. Elle lui dit qu’il vaudrait mieux qu’il ne soit pas à la ferme ce jour-là. Croyez-moi ou non, mais le Veudenne a dit à sa femme qu’elle avait raison et qu’elle saurait certainement y faire. Parce que, attendez, moi je l’appelle la vieille, mais à trente-six ans, c’était une belle plante la mère Veudenne. Pas élégante bien sûr en tous les jours, mais un peu habillée comme il faut, je crois pouvoir dire qu’elle pouvait plaire. J’étais un peu jeune pour juger. Mais j’avais entendu cela et ma curiosité en avait été piquée. Comme tous les gamins, j’étais un peu vicelard sur les bords et j’essayais de savoir des choses. Et des choses des adultes bien évidemment. J’avais pratiqué un trou dans le mur en torchis entre un grenier à foin et la chambre des vieux. Mais ceux-ci ne faisaient rien dans la chambre la journée et la nuit, j’avais été guetter à mon trou, mais s’ils faisaient des choses, c’était dans le noir. Et cela ne soupirait guère, j’entendais quelques grognements, sans plus. Quand monsieur le baron est revenu à la ferme, Veudenne l’a prié de l’excuser, mais il avait à faire dans un champ éloigné où il se rendit avec Mady. Moi, j’avais encore du fumier à sortir et j’y fus envoyé. J’espionnais en douce la cuisine et je me rendis compte assez vite qu’ils n’y étaient plus. Je montai donc dans mon fenil. Par mon trou, je ne voyais pas grand-chose mais assez pour voir que le baron avait la quéquette à l’air avec un braquemart, un truc comme je ne savais pas que cela existait. Puis je ne le vis plus car je ne pouvais pas voir le lit mais j’entendais des râles et des gémissements. Je crus d’abord qu’il frappait la vieille, mais je soupçonnai assez vite qu’elle consentait largement à ce que lui faisait subir le baron. Et puis, j’étais certes un peu niais, mais à la campagne, on voit les animaux, on apprend des choses sur le tas, si je peux dire. On connaît l’air même si on ne comprend pas toutes les paroles… Je ne me suis quand même pas éternisé, si le vieux revenait et qu’il trouvait le fumier dans l’étable, je me serais fait allumer. J’ai vu le baron qui repartait, il venait en auto lui aussi, une petite voiture vert clair, une Anglia. La patronne est venue voir si j’étais au travail. En me voyant travailler, elle s’est approchée de moi et m’a passé gentiment la main dans les cheveux en me disant que j’étais un bon petit. C’était bien le premier geste de tendresse qu’elle ait eu à mon égard. Le dernier aussi je pense. En tout cas, le baron est revenu régulièrement. Quand il venait, la mère Veudenne était toujours proprette et bien habillée, le vieux se barrait dans les champs avec Mady. Je crois que Mady ne se doutait de rien à ce moment-là. Et moi, une fois sur deux je dirais, j’étais là à sortir du fumier. Et j’avais réussi à améliorer mon trou dans la cloison, je pouvais voir une partie du lit. Bon, j’avais dix, onze ans, mais je faisais mon profit de ces séances de cinéma, je n’aurais en rien voulu les rater. Et de plus, finalement, tout le monde était content. Veudenne était cocu mais content. La patronne avait l’air d’aimer cela. Il n’y avait plus de menace d’expulsion et l’ambiance était au beau fixe.

– Cela aurait pu durer longtemps comme ça, dit Hervé.

– Oui, ce n’aurait été que les Veudenne, les choses auraient pu durer comme vous dites. Mais le baron, lui, je crois qu’il était fou. Un jour, il est arrivé, on était encore à table. Il s’est assis à côté de nous, en bout, et il s’est mis à plaisanter, à discuter, il a demandé mon âge, puis celui de Mady. Il l’a complimentée. Cela c’était à peine un mois avant que nous tirions monsieur Artur de l’eau, pour vous situer. Veudenne ne s’est pas attardé à table, il s’est levé et est parti avec Mady. La vieille m’a envoyé à l’étable comme d’habitude. J’ai commencé à sortir du fumier, il fallait bien que le boulot ait l’air d’avoir été commencé. Puis je suis monté à mon poste d’observation. J’avais sans doute un peu trop trainé, le baron semblait avoir conclu, il s’essuyait le bout tranquillement. C’est là que la chose terrible est arrivée.

(à suivre...)

dimanche 22 mai 2022

Contes et histoires de Pépé J II (35) L’or de l’Ariège

Oreilles attentives de Guyenne et Gascogne, bonjour. Cette fois encore je vous parlerai d’un conte de Michel Cosem extrait des « Contes traditionnels des Pyrénées » publié chez Milan en 1994. Cela s’appelle « L’or de l’Ariège».

« Il y a très longtemps, sur un piton abrupt, dominant la vallée, était construit un château fort de fière allure. La princesse de ce lieu s’appelait Mengarde et elle était alliée aux plus riches familles du comté de Foix, de Catalogne et d’Aragon. Elle était aussi fort belle et bien jeune. Pourtant elle avait été mariée il y avait longtemps déjà et elle se désolait, quasiment prisonnière dans cette forteresse caillouteuse. En effet, son seigneur et maître ne s’occupait pas d’elle. Il lui préférait la guerre qu’il menait au loin dans les plaines du nord. Là, à la tête de ses rudes soldats il ne cessait de remporter victoire sur victoire. Mengarde n’écoutait pas les messagers venus l’informer de tout cela. En filant sa quenouille elle pensait à autre chose. Un jour elle entendit sur la plus haute tour chanter des tourterelles et soudain elle se rappela avoir jadis rencontré un cousin du nom de Pedro, avec qui elle avait beaucoup sympathisé. Elle savait qu’il s’était établi en Aragon, du côté de Boltana et qu’il était très riche. Elle en rêva toute une journée. Et plus elle y pensait, plus elle sentait l’amour naître en elle. N’y tenant plus, elle envoya un messager à ce riche cousin pour lui dire le fond de son cœur.

- Mon prince, confia-t-elle à Pedro, je voudrais que vous veniez avec toute votre armée et tout votre or, prendre cette forteresse. Nul ne vous résistera. Ensuite vous aurez le pays à votre merci.

Pedro en recevant ce message se souvint très bien de Mengarde. Il l’avait trouvée jadis fort jolie et lui aussi devint fort amoureux.

- Je serai bientôt au pied de la forteresse, fit-il savoir à Mengarde, et j’aurai avec moi les plus fortes troupes d’Aragon et de Catalogne.

Ce qu’il dit se réalisa. Mengarde enfin heureuse alla à la nuit venue ouvrir elle-même la porte de son château. La garnison laissée par son mari fut massacrée. Quand ils se virent, Pedro et Mengarde furent tout heureux de ne pas s’être trompés. Quand le mari de Mengarde apprit l’invasion de ses terres, il accourut en toute hâte avec ses soldats. Mais déjà il était trop tard. Malgré sa bravoure il fut fait prisonnier et on le précipita dans le vide. Il mourut dans le torrent. Quelques jours plus tard, Mengarde et Pedro festoyaient avec ceux d’Aragon. Il y avait tant de bon gibier, tant de pâtés, tant de gâteaux aux amandes arrosés d’un bon vin de Catalogne que les lumières restèrent tardivement allumées. Les guetteurs virent pourtant tout au bout du sentier un vieil homme chenu, à la longue barbe blanche, appuyé sur un bâton noueux, gravir péniblement la rocaille. Arrivé devant la porte, il demanda à rencontrer Mengarde.

- Qui es-tu et que me veux-tu ? S’écria-t-elle fort en colère d’être ainsi dérangée.

Le vieillard posa longuement sur elle un regard à la fois grave et triste. Enfin il parla.

- Noble dame, alors que tu festoies et dépenses beaucoup d’or, tout le pays est dans la misère. Ta trahison sème partout la désolation. Il est temps de chasser l’étranger.

Mengarde pleine de colère s’écria : - Jetez ce fou du haut des remparts.

Elle venait à peine de prononcer ces mots qu’un éclair éblouissant sillonna le ciel, suivi presque aussitôt d’un grondement qui ébranla les monts. Un flot venu de nulle part envahit le château, fit tomber les murailles et emporta le prince aragonais et ses soldats.Il ne resta bientôt que la seule Mengarde isolée sur un rocher. Devant elle se trouvait le vieillard. Il lui dit :

- Tu as honteusement trahi ton pays, tu as trompé to seigneur. Tu seras désormais, pour l’éternité, transformée en torrent. Tu n’iras pas vers l’Aragon mais vers le pays de Foix. Tout l’or que tu as accumulé dans ton château a été emporté vers la plaine et après chaque orage les flots charrieront mille paillettes. C’est ainsi que l’Ariège devint le paradis des orpailleurs qui recherchent encore l’or de la traîtresse Mengarde.


jeudi 19 mai 2022

Dernier tableau (77)

 

– Peut-être. Vous savez, je n’y connaissais rien et je n’en sais guère plus aujourd’hui. Et je n’ai jamais cherché à en savoir davantage sur monsieur Artur et sa peinture, j’ai vraiment enfoui une partie de mon passé. Je suis en train de le ressortir, mais c’est vraiment après mure réflexion, j’espère que vous l’avez compris. De plus, je bavarde depuis un bout de temps, mais je n’ai pas encore parlé de ce qui est le plus important mais de ce qui est aussi le plus difficile à dire, à raconter.

– J’ai bien compris que vous y avez longuement réfléchi et il est légitime que vous ayez besoin d’avancer en douceur dans cette histoire, dit Hervé en terminant sa tasse de café.

– Si vous en voulez un peu plus, servez-vous, moi j’ai terminé, il ne faut pas que je boive trop de café tout de même. Donc, monsieur Artur voulait terminer la ferme et, avant de se mettre aux deux portraits, il devait aller à Paris pour une exposition. Il serait bien plus tranquille, disait-il, à son retour. Il revint quelques jours après dans sa grosse voiture, avec le tableau. Nous étions tous en admiration lorsqu’il nous le montra. Il dit qu’il allait nous le laisser et qu’il reviendrait avec un cadre. En fait, plus de six mois passèrent avant qu’il ne revienne nous voir. Lorsqu’il revint, il avait l’air fatigué. Il nous dit être allé à Paris, y avoir été retenu plus longtemps que prévu et être tombé malade au retour. En six mois, l’atmosphère était devenue irrespirable au Bussiau. Il le sentit bien, mais il voulait faire nos portraits et proposa de revenir le dimanche après-midi. Mady mettrait sa robe d’organdi, cette robe que monsieur Artur lui avait offerte, et il ferait des croquis. Il promettait de n’avoir besoin que d’une après-midi. Les vieux étaient devenus réticents mais lorsque Mady éclata en sanglots, ils n’osèrent plus refuser. Il fut convenu que monsieur Artur viendrait le dimanche en début d’après-midi, qu’il aurait jusqu’au soir, mais que Mady ne remettrait pas une autre fois sa nouvelle robe. J’étais gamin à l’époque mais je vous jure que je comprenais que monsieur Artur sentait qu’il y avait quelque chose dans l’air. Il ne pouvait s’empêcher de regarder Mady. Il partit et les Veudenne semblèrent bien soulagés. Il revint donc le dimanche et fit des croquis tout l’après-midi. Il avait été installé dans la chambre des parents qui servait de salon les jours de fête. Mady posait, elle avait les traits tirés, j’étais allé les voir. La vieille était sur le qui-vive et n’arrêtait pas de faire des allers-retours entre la chambre et la cuisine. Monsieur Artur a cependant continué à faire ses croquis. Vers six heures, il referma son carnet et vint nous trouver dans la cuisine. Il dit qu’il avait l’impression que Mady était souffrante et qu’il serait peut-être bon de la faire voir par le médecin. Les Veudenne poussèrent de hauts cris, il n’était pas question d’aller payer un docteur, la petite était tout au plus un peu fatiguée et ils l’enverraient se coucher de bonne heure. Elle trainait toujours le soir à lire des livres qu’elle ramenait de l’école, cela ne pouvait lui faire aucun bien – est-ce qu’ils lisaient, eux ? – et la nuit était faite pour dormir. Monsieur Artur s’en alla donc.

– Mady était malade ? demande Hervé.

– Je ne sais pas, mais ce que j’ai compris plus tard, c’est qu’elle était enceinte. Et c’est là que j’arrive à ce qui est le plus terrible. Mais pour cela, je vais devoir revenir en arrière, bien avant tous ces évènements. Donnez-moi la bouteille d’eau, s’il vous plait.


Il se verse un verre d’eau. Sa main tremble et il avale si vite son verre d’eau qu’il s’étouffe, pris d’une quinte de toux qu’il a bien du mal à arrêter. Lorsqu’il reprend son souffle, il s’essuie les yeux et Hervé pense que cet intermède n’est pas voulu, mais qu’il tombe à point nommé pour donner encore quelques secondes de répit à Achille.


– Bon, assez tergiversé, dit ce dernier. J’en arrive au plus important.

– Vous ne préférez pas remettre cela à une autre fois ? demande Hervé à contrecœur.

– Non, j’ai eu le temps de me préparer, une autre fois, je ne pourrai plus plonger dans cette boue. Laissez-moi vous dire, les vieux, les Veudenne, je vous l’ai déjà dit, c’était l’argent qui comptait pour eux. Mais ils ne savaient pas gérer leur affaire. Le Bussiau, c’était la ferme la plus pauvre du coin, quelques maigres prairies et peu de bonne terre. Mais un fermage à payer à la Saint-Michel. Enfin, un fermage ou un métayage, je ne sais pas exactement, mais toujours est-il que les bonnes années ils avaient du mal à payer ce qu’ils devaient. Alors quand on tombait sur une mauvaise année, je ne vous dis pas… 

(à suivre...)

dimanche 15 mai 2022

Contes et histoires de Pépé J II (34) Les sabots de Bethmale

Oreilles attentives de Guyenne et Gascogne, bonjour. Cette fois je vous parlerai d’un conte de Michel Cosem extrait des « Contes traditionnels des Pyrénées » publié chez Milan en 1994. Cela s’appelle « Les sabots de Bethmale ».

« Les Maures avaient depuis longtemps envahi le pays. Vers eux coulaient toutes les richesses et l’on s’attendait bien à les voir en profiter longtemps. Le chef de la vallée de Bethmale s’appelait Boabdil comme le dernier roi de Grenade dont il était le lointain parent. Son fils, qui s’appelait Boabdil aussi, lui ressemblait comme une goutte d’eau, avec ses yeux noirs, sa peau basanée, ses gestes langoureux. Il n’aimait pas beaucoup se livrer à un quelconque travail et les jeux de la guerre ne l’intéressaient pas. Toute la journé il se promenait dans les prairies fraîches à l’ombre des noisetiers , ou bien, mollement assis sur la rive d’un torrent, il confiait à l’eau ses tendres espérances.

Ce fut pourtant bien par hasard qu’il rencontra la plus jolie fille du pays. Qu’importe son nom ? Appelez-la Jeanne, Marie ou Amélie. Ses moutons attirés par l’herbe fine au bord du torrent la menèrent tout simplement à Boabdil. Quand les deux jeunes gens se virent, lorsque leurs regards se croisèrent, ils tombèrent follement amoureux. Pourtant Jeanne, Marie ou Amélie était déjà fiancée et son fiancé était dans la montagne avec tous les hommes des villages de la vallée qui avaient fui devant les Maures.

Là-haut, dans les forêts profondes, près des étangs gelés et des abîmes vertigineux, ils s’entraînaient au combat, taillant des arcs et des flèches, traquant les ours et les isards. Mais ils passaient aussi une grande partie de leur temps à scruter ce qui se passait dans la vallée.

La belle jeune fille n’hésita pas. Elle se laissa fléchir par la voix douce de Boabdil, ses gestes langoureux et ses rêveries infinies. Elle les préféra au parler rocailleux et abrupt du garçon de la montagne.

Celui-ci ne tarda pas à être averti de la trahison de sa fiancée. Il ne laissa rien paraître de ses sentiments, mais on le vit plus souvent parcourir la montagne, charrier du bois, remuer les blocs. Un matin, il découvrit un noyer déraciné par la tempête. Les racines effilées de l’arbre semblaient vouloir griffer les nuages. Il entreprit de les scier et alla les laver au torrent. Ensuite, il décida de se faire une bonne paire de sabots.

Assis sur une pierre plate qui dominait la vallée et d’où la vue s’étendait à tous les villages, il creusa la racine, polit, tailla et réussit des sabots dont le bout fin comme une aiguille remontait jusqu’aux genoux.

Quelque temps après, tous les bergers vêtus de peaux de moutons, de peaux d’ours ou de loups se rassemblèrent dans la montagne, puis s’élancèrent pareils à l’avalanche dans la vallée. Ils étaient armés d’arcs, de flèches, de lances, d’épées. Les Maures, surpris, essayèrent de fuir mais les bergers ne leur en laissèrent pas la possibilité. Il y eut quelques combats farouches entre les rochers et les troncs d’arbres, dans les rues du village. Le sang coula jusqu’au torrent. Mais le doute n’était plus permis, les bergers étaient victorieux.

Dès le lendemain, les vainqueurs défilèrent dans les rue d’Ayet. A leur tête s’avançait l’ex-fiancé , le visage haut, la poitrine gonflée. Tous les gens rassemblés poussèrent un cri de stupéfaction en le voyant. À chacune des pointes de ses sabots était enfilé un cœur : celui de Boabdil et celui de la plus jolie fille de la vallée qu’il avait séduite.

Maintenant vous savez pourquoi les fiancés de la vallée de Bethmale offrent à leur fiancée une paire de sabots au long bout qu’ils ont eux-mêmes soigneusement façonnés.


jeudi 12 mai 2022

Dernier tableau (76)

 

– Oui, vous savez, à l’époque, il n’y avait que la marche à pied pour nous et le vélo était pour les parents. Il fallait qu’ils lui fassent vraiment confiance pour lui prêter un vélo. Et il est revenu deux jours après, avec le vélo et une somme rondelette pour les vieux qui n’en croyaient pas leurs yeux. Ils lui ont proposé de rester manger avec nous, il a accepté et la vieille a mis les petits plats dans les grands. Il a dit qu’il voulait faire quelque chose pour nous, pour ces enfants qui lui avaient sauvé la vie, disait-il.

– C’était vrai, vous lui aviez sauvé la vie, il n’aurait peut-être pas eu la même chance que moi, dit Hervé.

– Oh oui, sans doute. Et vous, vous avez vraiment eu de la chance puisque vous vous êtes aventuré à la légère. Mais lui, il connaissait la côte et ses dangers depuis son enfance, je ne sais pas comment il a pu se faire avoir comme cela.

– Quel âge aviez-vous quand cela est arrivé ?

– Je venais d’avoir douze ans et Mady allait en avoir quinze. Mais laissez-moi terminer sur monsieur Artur. Il voulait nous offrir, à chacun de nous, un vêtement de dimanche, à Mady une robe et à moi un costume. Il demandait à venir nous chercher un après-midi pour aller à St-Lambaire chez un tailleur. Les parents étaient conviés à venir s’ils le voulaient, il arriverait avec une grosse voiture où l’on tiendrait facilement à cinq. Le père déclina l’offre et nous partîmes donc un après-midi à St-Lambaire. La voiture, je la vois encore, une grosse Buick noire où on aurait tenu à dix. Monsieur Artur conduisait, il avait réussi à descendre le chemin jusqu’au Bussiau. On est allés à St-Lambaire, pas à l’aise dans ce qui nous paraissait être une ville tentaculaire. Chez le tailleur, nous avons dû passer pour ce que nous étions, des paysans. Mais le tailleur a pris nos mesures et il fallut encore pas mal de temps pour se décider sur un modèle de robe pour Mady. Pour moi, les choses étaient plus simples. Monsieur Artur insista pour que j’aie un pantalon et pas des culottes courtes. J’étais aux anges, le pantalon était un signe de maturité et de virilité. Les culottes courtes c’était pour les gamins, le pantalon pour les hommes ! Monsieur Artur nous a ensuite fait entrer dans une pâtisserie où il nous a régalés de gâteaux. Des choses inconnues pour nous. C’est d’ailleurs resté mon péché mignon, comme je vous l’ai dit.

– Il reste le Paris-brest et la religieuse, à ce propos, intervient Hervé. Lequel préférez-vous ?

– Allons, je vous laisse le Paris-brest et je vais manger la religieuse, à défaut de bouffer du curé…


Ils se servent et reprennent chacun du café. Achille reprend :


– Pour nous, tout cela était bien extraordinaire. Monsieur Artur nous ramena au Bussiau et, en présence du père, il fit deux demandes : d’une part, il souhaitait peindre la maison et leur offrir le tableau une fois achevé – cette demande ne souleva aucune objection – et d’autre part il souhaitait faire deux portraits, un de chacun des enfants habillés avec leur futur habit de dimanche. Il offrirait les portraits aux enfants, précisa-t-il. Les vieux semblaient assez hésitants à ce sujet, allez savoir pourquoi. Mais monsieur Artur leva toute objection lorsqu’il expliqua qu’en fait, il faisait des croquis sur place et qu’il réalisait toujours ses peintures en atelier chez lui. Les vieux donnèrent leur accord et monsieur Artur revint quelques jours plus tard avec un carnet. Nous le vîmes de loin dessiner, mais nous ne nous serions pas permis d’aller le déranger, d’autant plus que nous avions toujours quelque corvée à effectuer. Il revint un autre jour et se présenta à la ferme comme nous finissions le repas de midi. Il venait fixer une date pour retourner chez le tailleur. Rendez-vous fut pris pour la semaine suivante et il vint donc nous chercher dans sa grosse voiture. Cette fois, la mère Veudenne ne nous accompagna pas, elle avait à faire déclara-t-elle. Nous revînmes de la ville fort excités, avec les vêtements emballés dans de jolis cartons. Il fut convenu que monsieur Artur reviendrait pour les croquis, il commencerait par Mady. Mais il voulait d’abord terminer le tableau avec la ferme. Il dit qu’il aurait besoin de beaucoup de concentration pour les portraits car ce n’était pas sa spécialité.

– En effet, à ce que je sais, il peignait presqu’exclusivement des marines, dit Hervé.

(à suivre...)

dimanche 8 mai 2022

Contes et histoires de Pépé J II (33) La porte

Oreilles attentives de Guyenne et Gascogne, bonjour. Je crains de vous avoir un peu laissé sur votre faim la semaine passée en ne vous racontant pas vraiment la fin de l’histoire de Marceau Esquieu « L’oiseau bleu ». Aussi, je vais vous en raconter une autre, toujours du même ouvrage. Elle s’intitule « La porta », la porte.

« Longtemps, longtemps, les hommes, les pauvres hommes, comme l’ours et le blaireau, mais moins puissants et moins agiles, longtemps les hommes se sont cachés, comme ils ont pu, dans les trous de terre, les arbres creux, les cavernes…

Tandis que les sylphes, les djinns, les elfes et les korrigans, libres de chair et de tripaille… plus légers, savaient se fondre et se confondre… aux veines me du bois et du rocher. Mais les hommes se cognaient partout à la nature cruelle.

Un jour enfin il s’en est trouvé un, plus malin et plus courageux, plus industrieux que les autres au fond de son trou de terre, de bois ou de rocher… Oui, l’homme a fait face au monstre qui le serrait de près dans son trou, et, pour lui barrer le passage et le tenir hors de portée, il a mis une porte à l’entrée du terrier, de l’arbre creux ou de la caverne. L’homme a mis une porte à sa maison !

C’est la porte, bonnes gens, qui va, qui vient mais qui ne change pas de place ! Car une porte -notez le bien ! - une porte doit pouvoir, à tout moment retenir et livrer passage. Malheur au portier négligent qui l’ouvre trop tôt ou trop tard, au distrait qui la laisse ouverte !

Chez nous, en plein jour, on ferme rarement la porte de la maison. On la fermait seulement les jours de glace, les jours de grande pluie et de canicule…

C’est qu’en ces temps anciens, de vie petite et resserrée, on prenait la taille sur tout : même sur les portes et les fenêtres. On faisait payer aux pauvres l’impôt sur les seuls biens qui leur restaient. Un impôt sur l’air et le soleil !

La maison, pardi, pouvait bien, à la rigueur, se passer de fenêtres ! Certes pas se passer de porte !

Et voilà pourquoi, la porte chez nous, on aimait la laisser ouverte !

Cette porte, macarèl ! Les pauvres bougres en profitaient tant qu’ils pouvaient !…

Tout le long du jour ainsi la porte restait béante...

Et par la porte grande ouverte, la maison, jusqu’au plus noir de l’âtre se gorgeait ainsi de soleil et de jour…

Intratz !

Intratz, brave mond, la porta es dubèrta ! »

Entrez, entrez, braves gens, la porte est ouverte !





jeudi 5 mai 2022

Dernier tableau (75)

 

à l’époque, c’est vrai, qu’ils ne faisaient pas dans la dentelle. Mais ne croyez pas que c’est beaucoup mieux de nos jours. Les travailleurs sociaux savent emballer leur merde dans des bas de soie. Ils ont de beaux discours, pondent de jolis rapports mais ils font leurs trente-cinq heures et basta ! Comme je suis passé par là, j’ai fait partie d’une association qui s’occupe de gamins qui dépendent de la DDASS. Je ne dis pas que tous les éducateurs et toutes les assistantes sociales ne valent rien, il y en a bien une ou l’autre qui sortent du lot, mais dans l’ensemble vous pouvez tout mettre dans le même sac, du dirlo au dernier des sous-éducs. Et c’est les enfants qui trinquent. Mais je m’égare. Donc j’ai été balancé dans un centre à Rennes. Et là, je suis allé un peu à l’école mais comme j’étais devenu un adolescent assez voyou, ils ont décidé que je ferais un apprentissage chez un maçon. Le patron était le dernier des trous-du-cul, un sale type qui me faisait bosser comme une bête et qui me traitait comme un moins que rien. Un jour, je me suis révolté. Je l’ai poursuivi avec ma pelle et je lui aurais tapé dessus si un type ne m’avait pas arrêté. Ce type, c’était un électricien qui travaillait sur le même chantier. Quand j’ai plus eu ma pelle en main, mon patron a voulu se venger. Mais l’électricien l’a menacé, il lui a dit qu’il allait porter le pet, qu’il avait vu comment il agissait avec moi. Mon patron s’est calmé mais il m’a viré. L’électricien est allé trouver les services sociaux en proposant de me prendre en apprentissage. Ils ont tout d’abord refusé et là aussi, il leur a foutu la trouille en leur disant qu’il pourrait attirer l’attention sur eux. Ce gars-là a été mon maître d’apprentissage, mon patron et finalement un père adoptif et adopté. Denis, il s’appelait. Il m’a donné le goût d’apprendre, le désir et surtout les moyens d’avancer. Aujourd’hui, vous êtes en face de monsieur Trouvé Achille. Mais à l’époque, je n’étais que le petit Vindiou… qui savait tout juste lire et écrire et qui parlait comme je vous l’ai dit. Il y avait donc Mady, ma grande sœur, la première personne qui m’ait pris en considération. à la ferme des Veudenne, c’est moi qui sortais tout le fumier, des vaches, des cochons, des volailles. Mady, elle, elle aidait pour la cuisine et pour la soupe du chien et des cochons. Quand il y avait à glaner, à chercher des champignons ou des châtaignes, des glands, nous partions tous les deux dans les bois ou dans les champs. C’est comme cela qu’un jour nous sommes descendus jusqu’au bord de l’aber, on voulait voir la marée haute. Et on a entendu appeler, c’était une voix d’homme, un homme qui se débattait dans la marée qui montait et qui n’arrivait pas à se hisser sur la berge. Avec Mady, on a ramassé une perche, une branche d’arbre et on la lui a tendue. Il s’est agrippé et on l’a remonté tant bien que mal jusqu’à nous. Il était épuisé, trempé et blessé au bras. Après qu’il ait soufflé un peu, il a repris ses esprits, il s’est relevé et nous l’avons guidé en le soutenant jusqu’à la maison, au Bussiau. Les vieux étaient partis aux champs et en leur absence, nous avons mis du bois dans la cheminée et rallumé le feu. On lui a porté de l’eau pour laver sa blessure, il s’est séché et réchauffé. Quand les vieux sont arrivés, on se serait pris une belle engueulée si ce n’était pas lui qui avait pris la parole. C’était assez rigolo de le voir, en singlet et en caleçon, expliquer aux parents Veudenne ce qui s’était passé et qu’il nous devait la vie. Et qu’il allait les dédommager pour les inconvénients qu’il avait causés. Il s’est rhabillé et les vieux lui ont prêté un vélo. Ils lui ont indiqué comment rejoindre la route et la direction à prendre.

– Il est reparti en vélo ?

(à suivre...)

dimanche 1 mai 2022

Contes et histoires de Pépé J II (32) Marceau Esquieu

Oreilles attentives de Guyenne et Gascogne, bonjour. Je ne parle pas l’occitan et, quand bien même le parlerais-je quelque peu, je serais trahi par mon accent pointu qui a toujours fait la joie de mes amis et voisins parlant le patois. Il y a même eu un personnage qui voulut non pas corriger mon accent mais m’aider à prononcer d’une manière satisfaisante les r tels qu’ils sont prononcés dans la région. Il me disait : « Répète après moi, Pierre : les occitans roulent toutes les pierres de Pyrénées... » Et moi de répéter avec application cette phrase que me faisait dire Marceau Esquieu, marcèu esquieu en langue occitane.

On ne présente plus Marceau Esquieu qui fut professeur de lettres classiques et d’occitan à Villeneuve-sur-Lot, écrivain, poète, conteur, homme de théâtre et de télévision ainsi que fondateur de l’école occitane d’été. Mais alors, comment se fait-il que, à la fin des années 60, un petit paysan ait pu rencontrer ce personnage à la plume féconde et à l’accent enchanteur. Je vous explique : il y avait dans ces années-là une opération qui avait lieu au début des vacances d’août pour sensibiliser les touristes venus du nord de la Loire aux charme des productions Lot-et-Garonnaises. Cela s’appelait « Opération Sourire » et consistait à se mettre sur la Nationale 21 dite « Paris-Barèges » avec force panneaux et à arrêter ces touristes pour leur faire déguster des pruneaux bien sûr ! - , des fruits et des vins locaux. Mais comme les producteurs de fruits et les viticulteurs étaient en pleine saison, c’étaient les éleveurs bovins qui jouaient le rôle d’hôtesses d’accueil. Je vous dis pas : toute une journée à faire le clampin sur la nationale à brandir des plateaux de pruneaux ou à faire déguster les vins locaux, ça occupe ! Ensuite, à 18 heures, on se dépêchait de revenir à la grange pour tirer le lait et soigner les bêtes. Puis on revenait faire la fête sur un parking du côté de la côte de Laudie, avec des grillades, du vin de Duras, assis sur des bottes de paille. Le lieu était apprécié des connaisseurs, on y vit passer, parmi d’autres, Mourousi en goguette avec son cameraman et c’est ainsi que Marceau est venu partager le repas avec nous.

Et donc, revenons à Marceau Esquieu et son œuvre. Je vais vous citer une histoire extraite d’un de ses ouvrages publié en 2004 à l’Institut d’Estudis Occitans « de cric a crac - obra contada » et elle s’intitule : « l’ausèl blau ». Je ne citerai que des passages en français dans le texte.

« Il est si bleu, cet oiseau bleu...si bleu… Les enfants seuls, qui ont la vue claire et le cœur pur, Regardez, regardez voler l’oiseau bleu, entre deux nuages, dans le ciel bleu ! Il chante si finement, si mélodieusement, si doucement chante l’oiseau bleu...qu’il faut s’arrêter presque de respirer pour entendre chanter l’oiseau bleu ! Toute son enfance, la fille jolie avait écouté chanter l’oiseau bleu. Il faut dire aussi qu’au pays, il est plus facile qu’ailleurs de voir passer l’oiseau bleu, dans un coin de ciel bleu, entre deux nuages… Il est plus facile au pays d’écouter les chansons de l’oiseau bleu ! Il suffit de faire silence et d’attendre, le cœur battant, que passe l’oiseau bleu. Comment ? Vous ne voyez rien ? Vous n’entendez rien ? Mais la fille jolie savait par cœur le passage de l’oiseau dans le ciel bleu, entre deux nuages. Elle en connaissait toutes les chansons. Elle avait poursuivi le cycle de ses études. Elle avait obtenu son Brevet, son BTS… Elle savait un peu d’anglais et d’allemand… La fille jolie se retrouva donc, après l’ANPE, le TUC, le SIVP, le FRAG… et quelques mois d’attente… la fille jolie se retrouva vendeuse dans un Supermarché. Vendeuse stagiaire au Département de l’Alimentation, rayon des fromages. Ici, vous ne serez pas dépaysée, cela vous rappellera l’air du pays ! Lui avait dit d’un air finaud le chef de rayon. Elle habitait loin, bien loin, quelque part en banlieue… haut, très haut, dans un studio, tout petit, tout gris… au neuvième étage d’une HLM…Là-haut, elle ouvrait toute grande sa fenêtre… pour chercher entre les grandes tours qui lui faisaient ombre, un coin de ciel bleu où passerait, où chanterait à son passage l’oiseau bleu. Et la fille jolie laissait nuit et jour sa croisée entrouverte... » Jusqu’au jour où… « E cric ! E crac ! Vaqui l’ausèl embarrat… e lo conte es acabat !...