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jeudi 4 août 2022

Dernier tableau (88)

 

– Sans commentaire, tu vis du fric de la sécu et tu fais du Schwarz pour pas la financer. T’es bien un petit cochon comme je disais. Tiens, sers-moi un coup de la boutanche que tu as payée avec le fric de la sécu.

– Voilà, voilà. Mais faut pas m’en vouloir, je suis tout en bas de l’échelle. Je te signale que les toubibs, avec les dépassements d’honoraires et autres, ils s’en font aussi du Schwarz comme tu dis.

– On va pas refaire le monde, tu m’as avoué tes turpitudes, elles sont à moitié pardonnées.


La conversation continue ainsi, languissante et sur un mode pâteux. Ils finissent la bouteille, ils se lèvent et, en titubant, vont payer leur dû à la patronne, rassurée lorsqu’ils lui déclarent qu’ils ont cent-cinquante mètres à faire pour rentrer à pied à la maison.

La fraicheur de la nuit les dégrise légèrement, mais ils ont un peu de mal à arriver sereinement à la maison d’Édith.


– C’est là qu’on va voir si on est bons, dit Hervé. Pas question de réveiller madame Lemond. On monte doucement l’escalier et tu serres les fesses !

– T’inquiète, je prends mes précautions, répond André avant de franchir le seuil.


Il largue une autre caisse sur le trottoir et entre. Ils montent l’escalier sans bruit et arrivent dans l’appartement d’André.


– Je vais ouvrir le canapé.

– Surtout pas, ce serait bien trop long, dit André qui enlève ses chaussures et s’affale de tout son long. Dis-moi seulement dans quelle direction sont les chiottes, ça peut toujours servir.

– C’est ici à gauche, répond Hervé. Bonne nuit, ma poule.


André ne répond pas, il dort déjà. Hervé entre dans sa chambre et, lui aussi, une fois déchaussé, se laisse tomber tout habillé sur le lit.


*


Le réveil est un peu difficile pour les deux comparses. André ouvre les yeux le premier, il reste un moment la tête entre les mains. Hervé sort de la chambre.


– Oh, déjà habillé, monsignor ?

– Il est l’or, monsignor. Soyons francs, j’ai moi aussi dormi tout habillé et je me réveille la tête dans le cul.

– Écoute-moi, il est presque dix heures. Tu vas te passer sous une douche froide puis tu me laisses la place. Ensuite, sans te commander, on va retourner au troquet d’hier soir avaler deux croissants et deux maxi cafés. Sans cela, on n’y arrivera pas. Exécution !


Sans discuter, Hervé entre dans la salle de bains. Il prend une douche froide puis laisse la place à André. Ensuite, ils partent au bistrot. La patronne les reçoit avec un petit sourire admiratif :


– Il y en a qui assurent, couchés tard et chargés, ils arrivent à émerger avant midi. Et pour ces messieurs, ce sera un petit jaune peut-être ?

– Beuh, non, dit André. Vous avez bien encore quelques croissants ?

– Je n’ai jamais de croissants. Si vous en voulez, la boulangerie est à côté, vous allez vous les acheter.

– Alors, deux très grands noirs et j’arrive avec les croissants.


Hervé s’assoit à une table et attend André qui revient peu après avec un sachet de croissants.


– Bon, on en est où maintenant ? dit-il.

– On en est qu’on a laissé les tableaux toute la nuit dans ta tire, répond Hervé.

(à suivre...)

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