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dimanche 17 mai 2020

Chronique de Serres et d’ailleurs V (36)


Auditrices et auditeurs qui m’écoutez, bonjour. La semaine passée, nous avions laissé le savant professeur Papillon sur la plage de l’ile dite Anonoma, voyant approcher le navire de l’amiral cap. Sautant de son brick, ce dernier hennit de joie en reconnaissant son savant ami. Au risque de l’éclabousser, il sauta du navire et dans ses bras. Après les effusions, il lui expliqua que son brick, en principe mû par l’énergie scolaire qui est l’énergie résiduelle inutilisée par les fonctionnaires de l’éducation nationale, s’était brutalement vu privé de cette ressource, contre toute attente, au moment du confinement. Sans s’étendre plus sur les causes mystérieuses de cette privation, cap expliqua au bon professeur que, étant passé à la voile en sortant son mât télescopique, il n’avait été porté que par une légère brise, trop faible pour mouvoir le bâtiment. Toutefois, homme de ressource, il se rappela qu’il avait équipé son bateau d’un système de rames mues par pédalier le jour où il avait cassé le mât d’origine en tentant de passer sous le pont Mirabeau, le même que celui sous lequel coule la Seine. Il proposait donc au professeur d’embarquer avec lui et de pédaler de conserve en espérant retrouver des vents dominants. Ce dernier accepta sans barguigner, à condition d’embarquer le spiraloselle qui est un exemplaire unique. Ce qu’entendant, les deux pandores ne se tinrent plus de joie de les voir s’en aller et ils leur offrirent un verre de leur spécialité, une sorte d’usquebac à base de lait de coco. Ils ne purent refuser cet étrange breuvage qui toutefois leur donna du cœur au ventre, puis ils gagnèrent la « Marrante », ce qui était le nom du brick, et chargèrent joyeusement à bord le spiraloselle.
Bien sûr, avec deux paires de mollets, l’élégant navire se mit à fendre les eaux et, sitôt les eaux territoriales anonomaises quittées, un vent favorable se mit à souffler. Ils mirent donc les voiles, faisant route non plus vers le Pacifique mais en direction de l’océan indien et du cap de Bonne-Espérance. Les vents furent favorables et ils attinrent rapidement l’embouchure de la Loire où ils durent amener les voiles et rentrer le mât télescopique. Et, par la grâce des inénarrables dirigeants de la république française, ce fut à ce moment-là que le confinement prit fin, ce qui permit un retour de l’énergie scolaire, ce qui évita à nos amis de devoir reprendre les pédaliers pour remonter le fleuve et surtout leur permit d’apprécier le merveilleux paysage tout au long des 1006 kilomètres de son cours, passant par Nantes, Angers, Tours pour remonter jusqu’en Ardèche. Ils durent toutefois mouiller l’ancre au confluent avec l’Aigue Nègre, pour une question de tirant d’eau. Baste,  il ne leur restait plus que 2 500 mètres pour arriver aux sources de la Loire, au pied du Gerbier de Jonc. De plus, la marche était facilitée grâce au passage de Jeanneton qui était venue couper le jonc avec sa faucille. Ils arrivèrent au moment précis où le docteur V. terminait ses ablutions dans la source géographique de la Loire et, après quelques effusions, ils lui expliquèrent les raisons de leur visite impromptue. « Messieurs, s’écria V., sachez que pour le traitement du zona par la méthode des semblables, il y a un remède souverain qui est d’introduire dans les chaussettes du patient du poil d’un animal possédant sur sa fourrure des bandes transversales colorées, dites zonales ! Le zèbre en est le prototype mais ce n’est pas l’animal le plus courant sous nos latitudes. Mais le raton-laveur et le blaireau peuvent très bien fournir de quoi soigner le patient. Le plus simple serait de dégarnir un blaireau à mousse de ses poils ou, à défaut, d’aller débusquer un raton-laveur dans un Inventaire de Jacques Prévert. Il suffit de dynamiser en plein air un macérat de poils dans une bonne huile végétale, laisser six heures au soleil puis introduire dans les chaussettes du patient qui doit les porter pendant au moins 98 heures. Professeur, vite, appelez le patient avec votre cornichophone, que nous lui annoncions la belle nouvelle ». Ils m’appelèrent aussitôt pour me donner le mode d’emploi détaillé.
On voit par-là que, pour être bien soigné, rien ne vaut un zèbre, un blaireau et un raton-laveur.



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