Suite à un incident technique, voici un court texte parodique pour remplacer la chronique habituelle.
Il y a des lieux où les âmes sont tombées en
somnolence, des lieux oubliés des dieux, désertés par la pensée, la créativité
et l’amour, lieux qui auraient pu être élus pour rayonner mais où ne souffle
plus qu’une bise rude et sans grâce. Simples endroits sans mystère, d’où est
bannie toute émotion, ils ne sont que mornes étendues dont les rivières ne sont
plus qu’égouts et où les montagnes sont à genoux, où l’herbe n’est plus sauvage
et où les fleurs sont domestiques. Seuls, les êtres humains qui y persistent
paraissent encore en vie, ils s’agitent, piaillent et avalent des nourritures
molles mais leurs âmes sont en léthargie, liées par de chétives entraves qu’ils
ne peuvent ou ne veulent briser et la seule présence de ces êtres que l’on
peine à qualifier d’humains a transformé le paysage et les éléments en un environnement
d’une mélancolie poisseuse d’où plus rien ne peut s’envoler et où le soleil ne luit
plus que d’une lumière sombre.
Tout l’être est profondément saisi aux tripes
d’angoisse et de mélancolie. C’est la tristesse qui nous envahit et altère
notre esprit en annihilant toute velléité de réagir.
D’où vient que ces lieux baignent dans cette
torpeur ? Est-ce une atmosphère gazeuse qui intoxiquerait les poumons,
sont-ce les eaux turbides de fleuves et rivières dont les vapeurs brumeuses
envelopperaient les êtres et les choses ? Sont-ce des ondes nocives et
insidieuses traversant les cellules et les cerveaux ? C’est encore plus incompréhensible
car ces lieux ne sont nullement voués de toute éternité à cette angoisse
délétère et il suffirait de peu pour que change leur destin, pour que
s’établisse un nouvel équilibre, pour que la joie vienne et demeure…
Mais alors, mais alors, Dimitri ? Silence !
Si les dieux sont partis, si les âmes sont en déshérence, si la bise mord les
visages, si le mystère a déserté ces lieux, que s’est-il donc passé ? Quel
est donc le flot qui, insidieusement, a noyé de ses effluves et effluents des
contrées entières et les a ainsi rendues impropres à la pensée, à la créativité
et à l’amour ? Il semble que des êtres soient chargés d’une mission
spéciale, obscure et ténébreuse, avec pour seul impératif de répandre la
sottise en des territoires voués par leur seule présence à l’affliction, à la
douleur et à une vague nostalgie de ce qui aurait été, de ce qui aurait pu être.
Et ils remplissent avec ténacité, obstination et efficacité leur douteuses
obligations car là où ils s’installent ne subsiste que leur immarcescible
stupidité : les terres s’en trouvent transformées, les airs en deviennent
pollués et la lumière même en devient obscurcie. Ces êtres s’accrochent, sûrs
d’eux-mêmes, et ils s’adoubent entre eux, stultitia
stultitiam prolificat…
Il y a des lieux où les âmes sont tombées en somnolence.
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