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jeudi 7 juillet 2022

Dernier tableau (84)

Deux minutes plus tard, le coffre est ouvert et Hervé voit deux paquets, il ouvre celui du dessus. C’est bien Le Bussiau, le tableau d’Artur Leyden. Il prend les deux paquets, referme le coffre sans le verrouiller et remonte voir André. Il ouvre la porte arrière de la fourgonnette dépose ses deux paquets, puis il revient s’asseoir à côté d’André.


– Tu avais raison, il fallait insister. Le gonze a changé de chignole, mais pas de goûts. Il aime les sportives de collection.

– Et il roule en quoi présentement ?

– Coupé jubilé, ça te dit quelque chose ?

– Nibe de nibe. Éclaire-moi.

– Dans les années soixante, BMW a sorti un coupé 1600, en 67 je crois, pour les cinquante ans de la marque. C’est plus très courant dans les rues, j’ai tilté. Sur le siège arrière, il y avait une sacoche, j’ai cru reconnaître la sacoche du mec. J’ai regardé dans le coffre et j’ai trouvé ce que je cherchais…

– Ne me dis pas que le coffre n’était pas fermé à clef…

– Non, mais tu sais, c’est le genre de serrure qui s’ouvre en soufflant dessus.

– Et on souffle dessus avec de jolis gants aux mains pour ne pas laisser la trace des lèvres, bien sûr. On fait quoi, maintenant ?

– Maintenant, j’ai bien envie de lui donner une petite leçon à mon jubilaire.

– Du genre ?

– Du genre lui balancer sa caisse dans la flotte. Mais ce serait dommage pour la caisse. Je pourrais la déplacer et la garer devant le commissariat. Ou devant une synagogue et bigophoner aux flics qu’il y a une voiture suspecte.

– Cherche pas trop loin, le coup du commissariat, c’est déjà pas mal. Mais pas à St-Lambaire, plutôt à Saint-Bélié. C’est plus facile de se garer et de partir en douce, crois- moi.

– D’accord. T’aurais pas une clé à griffe dans cette bagnole ?

– Oui, je crois bien. André se retourne, plonge le bras à l’arrière et le ramène armé d’une clé à griffe longue d’une quarantaine de centimètres.

– Parfait. C’est le passe obligatoire sur ces modèles en cas de blocage de la direction. Tu vas faire demi-tour et te garer à une centaine de mètres. C’est toi qui m’ouvriras la route, j’arriverai en faisant un double appel de phares. Dis-toi qu’on ne craint pas grand-chose de la part de Renato, avec ce qu’il a dans sa sacoche, il ne va pas porter plainte à la légère. On fonce vers le commissariat de Saint-Bélié, je gare la jubilé et tu me récupères. Pour les explications détaillées, je te ferai le vingt-heures après, avec la météo en prime. Maintenant, j’y vais. Il devrait me falloir au plus dix minutes.


Hervé glisse la clé à griffe sous sa veste et sort de la voiture. Il entend André démarrer la deuche. Il rejoint le coupé, regarde autour de lui, la rue est toujours calme. Il ouvre la portière du conducteur sans difficulté particulière et s’installe au volant. La direction n’est pas verrouillée et il lui suffit donc de débrancher quelques fils et de les reconnecter à l’aide des pontets qu’il avait emportés. La voiture démarre, le moteur tourne parfaitement. Il débraye, passe la première et fait sortir la voiture de sa place de parking. Il avance doucement dans la rue quand il voit arriver une silhouette. Il croit reconnaître Renato, il enfonce sa casquette sur ses yeux et accélère doucement. Ce doit bien être Renato car il réagit tout à coup et s’élance au milieu de la rue, barrant le passage à la voiture. Hervé s’arrête et commence à baisser la vitre, en faisant mine de vouloir parler. Renato vient vers la portière en gardant une main sur le côté de la voiture. Hervé accélère alors, brusquement, et sort de la petite rue. Il débouche un peu cavalièrement sur le boulevard, fonce en direction de la voiture d’André en faisant un double appel de phares. La deuche démarre immédiatement mais il la dépasse. Dans le rétroviseur, il voit Renato qui a couru jusqu’à l’angle de la rue et qui est maintenant bras ballants, regardant s’éloigner le coupé blanc. Hervé continue à foncer, il voit qu’André le suit péniblement mais qu’il reste dans son sillage. Arrivé au square Tocqueville, Hervé tourne à gauche puis, quand il sait qu’André peut l’apercevoir, il ralentit, met ostensiblement son clignotant à droite et se gare. Quand André arrive, Hervé lui fait signe avec le bras de passer devant. André accélère et les voilà partis. Ils traversent sans encombre les faubourgs de St-Lambaire et arrivent dans Saint-Bélié. André emmène Hervé dans le centre ville puis sur une avenue plus large où il lui fait signe. Hervé aperçoit le commissariat. Il n’y a même pas un planton dehors et il se gare à une quinzaine de mètres. Il sort de la voiture sans la verrouiller et fait tranquillement à pied les quelques mètres qui le séparent de la deuche, la casquette toujours rabattue sur les yeux. Il prend place dans la camionnette et André démarre.

(à suivre...)


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