-
Ce gars est connu, il a fait de la scène, c’est un de ces rappeurs des
cités... Il a sorti un disque ou l’autre. Je l’ai connu il y a trois ans à
l’occasion d’une affaire de divorce, il n’était pas mon client… enfin, c’est un
peu compliqué… disons qu’il me faisait chanter…
-
Chanter ? demandé-je.
-
Oui, il me faisait chanter, s’écrie Benledek avec force. Je ne sais pas
comment il a su -mais il a su – que j’étais sorti avec une jeune fille, une
mineure. Mais je ne savais pas, moi, qu’elle était mineure. Vous savez, de nos
jours, à quatorze ans, les filles en paraissent bien plus…
-
Ton histoire de détournement de mineures on s’en fout. Je veux en savoir
plus sur ton – comment l’appelles-tu encore ? - ton gus qui te faisait
chanter. C’est lui qui t’as mandaté pour aller trouver le président de la
fondation CL ?
-
Pas directement. Il m’a envoyé un de ses hommes de main, un beur des
cités. Il m’a dit qu’il venait de la part de ce Latik, il m’a dit de rencontrer
ce monsieur, un garagiste de Toulouse et de négocier avec lui. Et qu’il fallait
faire vite, la vie de l’otage en dépendait…
-
Et tu as touché du fric pour ça ? demandé-je vertement.
-
Rien mais il me promettait de me laisser tranquille, de ne plus me
demander d’argent…
-
Ah, c’était presque du bénévolat, quoi ! Allons, l’adresse du gars,
son pédigrée, son numéro de téléphone. Et vite…
-
Mais je ne sais pas où il habite, pleurniche-t-il, il a…
-
Ducul, écoute-moi, déclare Léon, tu vas nous dire tout ce que tu sais
sur ce ticket d’bus, de haut en bas, en long, en large et en travers, urbi et orbi et patin couffin, sur le
mode vitesse rapide, on n’est pas d’ici et on veut tout savoir avant de partir.
Alors, schnell !
-
Lui, je ne sais pas où il habite mais vous pourriez trouver, je vous
l’ai dit, c’est quelqu’un de connu. Mais son homme de main, je sais qui c’est
et je connais son adresse : il s’appelle Alouari Kantonès et il habite à
Arcueil, impasse Halfon-Sallait au numéro 18.
-
Et tu le connais comment, monsieur Ducul ? repris-je sans aménité.
-
Je suis sorti avec sa sœur, c’est à son sujet que Latik Edkès me faisait
chanter…
-
Sorti ? Tu couchais avec, non ? interroge Léon.
-
Oui, bon, mais c’est du passé, je vous jure…
-
Inutile de jurer, nous ne voulons que la vérité. Et son numéro de
téléphone ?
-
En effet, j’ai bien noté un numéro, je vais vous le donner… mais…
promettez-moi…
-
Ici, on ne promet rien, maître Ducul. Les bases de notre accord sont
claires : tu nous dis ce que tu sais ; tu fermes ta gueule sur notre
visite, quel que soit ton interlocuteur, et tu nous oublies, ce qui s’appelle
oublier. En échange, on ne parle de toi ni aux flics ni à qui que ce soit
d’autre si – et seulement si – tu nous dis tout ce que tu sais sur les fumiers
qui ont flingué la femme prise en otage. Car, dois-je te le rappeler, petites
burnes, tu es complice jusqu’au cou, complice d’un assassinat !
-
C’est vrai ça, ils l’ont tuée ?
-
Devine ! Bien sûr qu’ils l’ont flinguée. Et toi, là-dedans, tu es
mouillé jusqu’au cou, continue Léon. Donc, si tu nous file un tuyau crevé, tu
cours des risques, de gros risques : aujourd’hui, on est venu faire une
visite de courtoisie, entre la poire et le fromage mais il se pourrait qu’on
devienne mal raisonnables, pour ne pas dire pire, dis-je en me relevant.
-
Ecoutez, je vais vous donner le numéro du dénommé Kantonès, vous avez
son adresse, je suppose que vous pourrez retrouver Edkès en faisant quelques
recherches…
(à suivre...)
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